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l’institution. Ils pourront constater les déplorables résultats que ces comités ont donnés dans la pratique, combien ils ont déçu les espérances de ceux qui les avaient imaginés. Ils verront comment la constituante a été amenée, à bref délai, à les destituer de leurs fonctions ou à rétrécir leur domaine, devant la double certitude que les comités n’accéléraient point le travail parlementaire et qu’ils étaient un grave obstacle aux bons rapports entre les pouvoirs publics. Nous avons multiplié les faits et les citations afin de ne laisser aucun doute sur l’exactitude de nos conclusions. Le travail est peut-être un peu touffu, mais nous avons l’espérance que les arbres ne cacheront pas la forêt.


I. — ORIGINES DE L’INSTITUTION DES COMITÉS.

Ce serait une grave erreur de croire que les constituans de 1848 ont obéi à des motifs exclusivement doctrinaux ou techniques lorsqu’ils ont renoncé au règlement qui, depuis 1814, avait présidé aux travaux de nos assemblées parlementaires. Ce règlement était loin d’être parfait, mais il avait suffi à huit assemblées dont quelques-unes avaient fait bonne figure devant l’histoire. Les chambres de. la restauration et de la monarchie de juillet avaient parfois montré à l’égard du pouvoir une docilité excessive et malheureuse. Quelques-unes avaient été fort médiocres. On ne peut pas oublier, toutefois, que plusieurs d’entre elles ont laissé des monumens législatifs absolument remarquables, et que la tribune française a vu, sous leur règne, des débats d’une ampleur et d’une élévation comme elle en a rarement revu depuis.

Le règlement de 1814 s’était perpétué, avec de légères modifications, pendant trente-quatre ans. Il fractionnait un peu trop le travail législatif et n’opposait pas, dit-on, une barrière suffisante aux excès de l’initiative parlementaire ; mais ce ne fut point le reproche qui lui fut adressé par les nouveaux députés. Il ne fut presque pas question de lui, de ses qualités et de ses défauts dans la grande et importante discussion qui eut lieu en mai 1848. On l’abandonna systématiquement, non point comme défectueux dans ses détails, mais parce qu’il se heurtait directement à la situation et aux préoccupations nouvelles.

La commission du règlement nommée par la constituante se composait, en grande majorité, d’anciens membres de l’opposition constitutionnelle de la chambre de 1846. On y remarquait les noms de MM. Dufaure, vivien, Gustave de Beaumont, Duvergier de Hauranne, de Corcelle, Pages de l’Ariège, Dupin, Havin, Jules de Lasteyrie, Crémieux, Billault, Stourm. L’assemblée avait pensé que