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se prêter. D’autre part, en agrandissant les cadres du personnel, le législateur de 1879 a corrigé l’une des erreurs de l’assemblée nationale. Mais, en rétablissant la section de législation sans se préoccuper de ce qu’elle deviendrait une fois rétablie, sans lui assurer un contingent normal d’affaires ou d’études, sans s’être demandé avant tout s’il n’allait pas créer un rouage inutile, ou qui resterait inutilisé, il a commis une faute capitale.

Ici je dois donner quelques explications un peu techniques, mais nécessaires à qui veut comprendre la première des deux questions que les chambres ont à trancher.


III.

Si l’on passe en revue les métamorphoses que le conseil a subies depuis l’an VIII, on constate que, à l’exception d’une période assez courte, les quinze ans qui séparent l’ordonnance du 26 août 1824 et celle du 18 septembre 1839, il y a toujours eu une section de législation[1]. On constate aussi que les attributions et le mode de fonctionnement de cette section ont fort peu changé. Il y a eu deux systèmes. L’un est celui que la loi du 3 mars 1849 avait institué ; il n’a guère duré plus de deux ans. Sous l’empire de cette loi qui, appliquant avec une logique rigoureuse et une symétrie toute française le principe de la division des compétences, avait incarné dans trois grandes sections les trois attributions fondamentales du conseil, la section de législation n’était point appelée à connaître des affaires courantes de l’administration : sa fonction, par excellence, était de préparer les lois. Mais aussi elle les préparait toutes, — j’entends toutes celles que le conseil avait mission d’élaborer. L’autre organisation, fort différente, a existé depuis l’origine, depuis l’arrêté consulaire du 5 nivôse an VIII, et elle a traversé jusqu’à notre temps les régimes les plus dissemblables. Dans ce système, qui est encore en vigueur, la section de législation est une section administrative au même titre que les autres : celles des travaux publics, de l’intérieur, et des finances. Je veux dire qu’elle a de même ses ministères correspondans, à savoir les départemens de la justice et des affaires étrangères. C’est elle, en conséquence, qui est saisie des projets de loi que ces deux administrations soumettent au conseil. Mais, notez-le, elle n’est

  1. L’ordonnance du 26 août 1824 avait réuni en fait le comité de législation au comité du contentieux, lequel reçut, après 1830, la dénomination de comité de législation et de justice administrative. Il eut ainsi un double caractère, élaborant les projets de lois ou de règlemens que lui renvoyait le ministère de la justice et préparant les affaires contentieuses. L’ordonnance du 18 septembre 1839 rétablit les deux comités distincts.