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pas encore entrés dans les usages industriels, et on ne les y rencontre guère avant le XIVe siècle.

Telle est la collection de formules, recettes et descriptions pratiques, intitulée « Formules pour la peinture. » Le manuscrit qui les contient remonte, je le répète, au VIIIe siècle ; il fournit les renseignemens les plus curieux sur la pratique des arts au commencement du moyen âge et dans l’antiquité.


III.

Le groupe de recettes transmis par les « Formules de peinture » a passé entièrement, ou à peu près, dans une collection plus étendue, intitulée « la Clé de la peinture » (Mappœ clavicula), et dont il existe un manuscrit du Xe siècle, étudié par M. Giry, dans la bibliothèque de Schlestadt. Le même ouvrage a été publié, en 1847, par M. Way, d’après un autre manuscrit du XIIe siècle, dans le Recueil de la Société des antiquaires de Londres.

Le premier manuscrit est exempt de toute influence arabe, tandis que celle-ci est signalée seulement par cinq articles interpolés dans le second.

L’ouvrage se compose de deux parties principales, savoir :

Un traité sur les métaux précieux, comprenant aujourd’hui cent articles, traité qui comportait en réalité une étendue à peu près double, d’après une vieille table conservée dans le manuscrit de Schlestadt ; mais la moitié environ de l’ouvrage proprement dit est perdue.

Un autre traité est relatif à des recettes de teinture. Ce dernier reproduit presque entièrement les Formules de teinture, quoique dans un ordre parfois un peu différent ; puis on lit seize articles de balistique militaire et spécialement incendiaire, formant un groupe particulier ; d’autres, relatifs à la balance hydrostatique, aux densités des métaux ; enfin, des recettes industrielles et magiques, ajoutées à la fin du cahier.

Le traité relatif aux métaux précieux offre un grand intérêt, parce qu’il présente de frappantes analogies avec le papyrus égyptien de Leyde, trouvé à Thèbes, ainsi qu’avec divers opuscules antiques, tels que la Chimie, dite de Moïse, renfermés dans la Collection des alchimistes grecs. Plusieurs des recettes de la « Clé de la peinture » sont non-seulement imitées, mais traduites littéralement de celles du papyrus et de celles de la collection des alchimistes grecs : identité qui prouve sans réplique la conservation continue des pratiques alchimiques, y compris celle de la transmutation, depuis l’Egypte jusque chez les artisans de l’Occident latin. Les