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hydraulique du Sahara est beaucoup plus fortement constitué qu’on ne se l’imagine en général. Cette vaste surface est loin d’être une des plus sèches du globe. Sur terre ou sous terre, sauf quelques zones d’une étendue restreinte, l’eau s’y rencontre fréquemment.

Si les caravanes sont obligées, en général, de s’abreuver à des puits précaires et très inégaux, c’est que l’œuvre de l’homme est ici absolument nulle, il n’a en rien aidé la nature ; il lui nuit, au contraire, par ses déprédations et ses instincts destructeurs. Ces puits n’ont, depuis une série de siècles et peut-être depuis l’éternité, été l’objet d’aucun entretien, d’aucun aménagement. Dès qu’on y arrive, surtout avec 400 hommes et 1 200 ou 1 300 chameaux, il faut les curer. Voici une mention du journal de M. Foureau sur l’un de ces puits, celui d’Ain el-Hadjadj à une trentaine de journées de marche au sud de Ouargla. « Ce puits, comme je l’avais constaté plusieurs fois (dans de précédens voyages), est comblé par le sable jusqu’au ras du sol. Les Touareg ont détruit le jeune dattier que j’avais semé il y a trois ans et qui existait l’an dernier, et en outre ils ont enlevé trois ou quatre rangs des pierres plates qui formaient le coffrage de l’édifice du puits[1]. » On peut juger, par cet exemple, de l’incurie des nomades à l’endroit des points d’eau ; toute idée de les améliorer leur est étrangère.

Les puits sont, sans cesse, bouchés ou éboulés. A la date du 5 février, dans la section d’In-Azaoua à Iferouane, appartenant au Sahara méridional : « Un seul puits nous fournit l’eau actuellement ; il y en a bien eu deux autres ici, très voisins du premier, mais ils sont remblayés par le sable et leur orifice éboulé ne forme plus qu’un vaste entonnoir[2]. »

Parfois, le moindre aménagement donnerait un résultat notable ; le 8 décembre : « Derrière ce rideau on accède à une sorte de cirque de peu d’étendue sur lequel un espace d’environ un hectare est recouvert de joncs et de roseaux, et dont le sol est légèrement exhaussé. A l’extrémité sud de cette surface sourd un petit filet d’eau claire et excellente, qui serait même assez abondante si l’on dégorgeait suffisamment la source. Le massif d’où sort cette eau est un amas de détritus végétaux, ayant peu à peu surélevé le sol[3]. »

  1. Mission saharienne, p. 43.
  2. Ibid., p. 141.
  3. Ibid., p. 49.