Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 11.djvu/81

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LKS DEUX VIES. ih que la loi met eu son pouvoir. Un procès pareil peut durer des années. Si vous le perdez, que deviendrez-vous ? — Et pourquoi se défend-il? Qui ly force? s’écria Francine indignée. — Vous imaginez-vous donc qu’avec ses idées, Fernand con- sentira jamais au divorce? Détrompez-vous, Francine. Le ma- riage est un lien trop sacré pour se rompre par caprice. D’ail- leurs, votre mari vous aime; jamais, entendez-moi bien, jamais il ne se prêtera à une rupture impie. Vous êtes sa femme, de- vant Dieu et devant les hommes, et vous la resterez. Malgré SOS torts, malgré les vôtres, et ce que vous pouvez avoir tous deux à vous reprocher, il vous a, il vous garde. — Moi, ou mon argent? ricana Francine. Et, comme sa belle-mère, d’un geste digne, écartait l’impu- tation injurieuse, et cependant à demi vraie... — Ah ça! mais, je rêve! Mes torts ! j’ai des torts? De grâce apprenez-les moi ! — Vous ne semblez pas vous douter, reprit M"*" Le Hagre, que Feriumd, s’il le voulait, — ne l’espérez pas, — pourrait obtenir contre vous la séparation de corps : oubliez-vous que vous avez été pour lui une femme révoltée, empoisonnant sa vie par votre impiété, vos désobéissances, par la violence de votre caractère, par des scènes blessantes, par votre refus d’ac- complir vos devoirs conjugaux?... — C’est assez! dit sèchement Francine. M"""^ Le Hagre se leva : — Je vois que votre parti est pris. Je n’ai plus rien à faire ici. Puissiez-vous n’avoir pas à vous repentir!... Puis, se ravisant au moment de sortir : — Je voudrais bien embrasser Josette; depuis trois semaines je ne l’ai pas revue, cette petite chérie... M"’" Favié fit un mouvement : en son cœur de graud’mère, elle ne se reconnaissait pas le droit... mais Francine, qui, méconnue, venait de trop souffrir, voulut affirmer son autorité. Elle déclara, presqu’à voix basse, tant l’émotion la suffoquait : — Non, pas ici. M""’ Le Hagre soupira: — Alors, je l’embrasserai chez son père. Et elle ajouta, sur le p.ilier : — Car il réclamera la garde de l’enfant î