Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/581

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

diplomatiques. Les deux gouvernemens se préparèrent alors sans relâche en vue d’une conflagration qui ne semblait plus pouvoir être évitée. Durant quatre mois, on vécut de part et d’autre sur le pied d’une hostilité réciproque, et enfin, dans la première quinzaine de septembre, éclatait à Chambéry la nouvelle, depuis trop longtemps prévue, que le général de Montesquiou, commandant l’armée française du Midi, avait reçu l’ordre d’entrer dans la Savoie et de s’en emparer.


II

Dans la vallée de Chambéry, à son point de jonction avec celle du Graisivaudan, sur un mamelon pittoresque, au milieu de jardins étages en terrasses, s’élève le château des Marches. « Il affecte la forme de deux carrés longs reliés entre eux par un parallélogramme contenant la grande salle de réception, au-devant, la cour d’honneur avec ses portiques à colonnes de marbre. Cette vaste salle des fêtes, d’une dimension de dix-huit mètres sur quatorze, de la hauteur de deux étages, est décorée de fresques exécutées au XVIIIe siècle par les frères Galliari. Sur le côté nord de ce salon, se trouve la chapelle ; à côté le grand escalier[1]. » Le château des Marches est immense. Durant les guerres du moyen âge, quand il défendait la Savoie contre les entreprises de l’étranger, il a pu contenir plusieurs centaines de soldats. De grosses tours rondes lui donnent un aspect féodal. On y accède par plusieurs avenues dont la majesté atteste l’existence séculaire. L’une d’elles traverse un village qui touche au château.

Des terrasses, on découvre un panorama sans rival : en face de soi, sur le premier plan, les montagnes d’Allevard, au-dessus celles de la Maurienne et du Dauphiné ; à gauche le massif des Bauges, à droite, le mont Granier dressant son sommet déchiré sur la plaine des « Abymes » qu’en 1248 il couvrit de débris gigantesques subitement détachés de ses flancs, en ensevelissant du même coup la petite ville de Saint-André, siège du Décanat de Savoie, construite à ses pieds.

Dans le vaste espace creusé entre les hauteurs que couronne

  1. Notice distribuée au moment où le château allait être mis en vente. Mlle Costa de Beauregard, religieuse de Saint-Vincent de Paul, y a fondé un orphelinat.