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Le dix-huitième arrondissement, c’est Montmartre. C’est là que la population est à la fois la plus forte en nombre et la plus serrée, en des rues étroites qui se coupent en tous sens. Sur certains points, les habitans sont 700 à l’hectare, proportion supérieure à celle du centre de Paris, et le territoire est immense. Les quartiers sont disposés en tranches successives : les Grandes-Carrières, le plus vaste ; Clignancourt, le plus peuplé ; la Goutte-d’Or, où il n’existe pas une grande voie ; et La Chapelle, isolé entre les deux gares du Nord et de l’Est.

Les Grandes-Carrières ont des aspects bien différens suivant les régions. De la station Ornano à la Porte Saint-Ouen, entre l’enceinte et le chemin de fer, est réunie une tribu de chiffonniers, de marchands ambulans et colporteurs, qui est misérable au-delà de toute expression. En bordure de l’avenue de Saint-Ouen, dans tous les passages, cours, impasses et villas qui avoisinent la rue Championnet, on retrouve la population d’employés et d’ouvriers qui peuple les Epinettes. Dans le voisinage du cimetière, c’est le même monde qu’aux Batignolles. Boulevard de Clichy, apparaît ce groupement spécial à Montmartre de gens de lettres, artistes, musiciens, amateurs d’art et gens de théâtre, attirés là par tous les bals, concerts, cabarets littéraires. Puis, sur la butte, les dames hospitalières de la rue Lepic, les petites couturières et modistes, les amateurs de plein air. De grandes et belles maisons se dressent maintenant sur les pentes, du côté de Paris ; c’est à peine si l’on peut y noter l’existence d’un jardin. Sur l’autre versant, il reste encore quelques terrains non construits ; mais, dès maintenant, la place est prise par une foule d’employés et gagne-petit qui espèrent trouver là des loyers moins lourds qu’ailleurs. Il y a des pauvres un peu partout. Ceux qui reçoivent des secours mensuels sont très nombreux, et aussi les nécessiteux d’occasion. Cependant, on peut indiquer, comme des centres particulièrement désignés d’indigence, la villa Championnet, l’impasse des Grandes-Carrières, et toutes les petites rues, entre la butte et l’enceinte.

Clignancourt est le quartier de Paris qui compte le plus d’habitans. Le boulevard Barbes, les rues de Clignancourt et Ramey sont les voies directes menant à la ville. Ceux qui connaissent le quartier assurent qu’une distinction est à faire entre le Nord et le Sud de la rue Ordener. Au Nord, entre les vastes ateliers des Petites Voitures, des Omnibus, et de la Compagnie du Nord,