Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/176

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nous ne nous ferons pas non plus illusion sur la portée des méthodes curatives limitées au seul organisme naval. Tant qu’on n’aura pas assaini la vie publique, l’organisme naval souffrira, comme tout souffre autour de nous.

Resterait à faire un choix entre les traitemens les mieux appropriés. Mais les projets mis en avant n’offrent guère que de grandes lignes. Le sol est trop peu déblayé, les idées sont trop mal assises. On hésite à s’engager dans le détail. Il convient de s’assurer d’abord du point de départ ; et c’est à quoi les compétences jusqu’ici peu écoutées doivent collaborer. Car on ne saurait sans consulter les militaires rebâtir avec profit un édifice dont le grand défaut est le manque d’appropriation militaire. C’est à la lumière de la doctrine navale que doivent s’établir les plans nouveaux. Or cette doctrine n’apparaît qu’à peine. Elle commence seulement à se dégager du mouvement d’idées créé par l’Ecole supérieure de marine et par le spectacle des faits récens. Elle n’a même pas son organe : un véritable grand état-major. Rien ne supplée un pareil instrument de pensée militaire. Une première réforme consisterait donc à compléter l’état-major général de la marine, à le débarrasser des occupations parasites, à y créer une section historique, à lui subordonner étroitement l’Ecole supérieure, à le rendre enfin juge des questions de principe et des propositions de fait qui touchent à futilisation de la flotte. C’est l’étape préparatoire. Quand par l’histoire critique, l’étude des cas concrets et la préparation minutieuse des plans de campagne, avec leurs répercussions techniques, le grand Etat-major aura défini sa doctrine, expression réfléchie de l’opinion navale formulée par ceux qui doivent en porter, en fait, la responsabilité, on y trouvera la base d’une réorganisation désormais sans arbitraire.

Au point de vue administratif aussi, une réforme préparatoire déjà amorcée pourrait s’achever. En créant une Conférence des Services d’Action, qui réunit, sous la présidence du ministre, les principaux directeurs de l’administration centrale, M. Thomson a pris modèle sur l’amirauté anglaise. Cette dernière tient séance au moins une fois par semaine, et souvent davantage, deux cent vingt-quatre fois par exemple au cours d’une certaine année. Notre Conférence est loin de compte ; elle économise néanmoins du temps, des écritures, des frottemens. Là où une réponse mettait plus longtemps pour traverser un couloir de la rue