On peut dire que la presse n’existait pas sous l’ancien régime. Que se passait-il ? — On n’en savait rien. Un exempt n’eût pas tardé de déposer entre les murs de la Bastille l’imprudent qui se fût avisé de faire imprimer le moindre journal[1].
Il est vrai que, depuis 1631, paraissait la Gazette, fondée par Renaudot et pourvue par Richelieu d’un privilège exclusif ; mais cette gazette hebdomadaire ne donnait pas le contenu d’une demi-page d’un de nos quotidiens. Et quelles nouvelles ! Certes la Gazette avait des intelligences auprès de la Sublime Porte et dans les Etats du Grand Mogol ; elle en avait moins en France. Les informations d’une semaine consistaient à dire que tel ou tel seigneur était parti pour sa maison des champs ou que Madame Deuxième avait présenté aux fonts baptismaux la petite-fille de la duchesse de Créquy. Le reste n’existait pas, ou, du moins, ne devait pas exister pour le lecteur.
Les lettres privées tenaient lieu de gazettes. Et voici les premiers et charmans journalistes : Mme de Sévigné, Mme de Grignan,
- ↑ La plupart des textes inédits, où nous avons puisé pour écrire les pages suivantes, proviennent des anciennes archives de la Bastille, aujourd’hui conservées à la Bibliothèque de l’Arsenal.