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possible de la ramener à ses anciennes limites. « Quelque soin que l’on ait pris, lisons-nous dans un rapport de police, pour empêcher les nouvelles à la main, cet abus n’a été que suspendu et, tout au plus, pendant quinze jours, et encore ce n’a été que dans Paris, où ceux qui les distribuaient ont aussitôt recommencé de le faire, eu plus grande quantité qu’auparavant, d’autant que la défense n’a fait qu’augmenter la curiosité des uns et fait naître en même temps celle des autres, en sorte que tout le monde voit les nouvelles manuscrites plus que jamais. »

Puis s’ouvre la Régence, où le mouvement de tolérance, que nous avons indiqué, se poursuit. Le Duc d’Orléans ne fait plus poursuivre les nouvellistes que pour écrits calomnieux. Le Duc de Bourbon, qui préside aux destinées de la France après la mort du Duc d’Orléans, reprend sa politique sur ce point, l’accentue ; c’est sous son principat qu’est inauguré le système des « manuscrits autorisés ; » organisation sur laquelle le lieutenant de police même va nous renseigner.

« Les particuliers qui veulent donner des nouvelles au public, sont obligés d’en apporter deux exemplaires au lieutenant général de police, qui en prend lecture, retranche ce qu’il juge à propos ; après quoi, il en délivre au particulier un exemplaire approuvé de lui et en garde un de son côté, pour le confronter avec les copies que l’on en délivre au public (note datée de 1724). »

De nombreuses feuilles, ayant subi cette sorte de censure, nous ont passé sous les yeux ; plusieurs alinéas portent en accolade l’adjectif : « Bon ; » d’autres ne sont accompagnés d’aucune mention ; certains sont biffés : c’est le petit nombre. À en juger par un rapport de police de 1725, les résultats donnés par cette manière de procéder auraient été satisfaisans.

Ajoutons que ce contrôle semble avoir entraîné comme la garantie du gouvernement pour la qualité même des gazettes, car nous voyons la lieutenance de police veiller à la fraîcheur des nouvelles publiées sous son estampille et à la manière dont elles sont rédigées. Un « nouvelliste approuvé, » l’abbé Faure, perd le bénéfice de cette autorisation parce que ses informations sont « trop vieilles ; » un autre, Du Breuil, doit s’excuser : si ses nouvelles ne sont pas de première qualité, c’est qu’il est en prison, — excellente excuse en effet pour un publiciste de qui les