Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/357

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les quatre Franciscains espagnols, dix-sept de leurs convertis Japonais et trois Jésuites furent crucifiés à Nagasaki le 5 février 1597. La persécution commença aussitôt. Elle eut parfois quelque répit, grâce aux guerres civiles dans lesquelles certains chefs cherchaient à nouer des relations avec l’étranger. Mais le gouvernement triompha, le christianisme fut condamné et le Japon entièrement fermé aux Européens jusqu’au traité de Kanagawa en 1834, c’est-à-dire pendant 257 ans. Dans la pensée japonaise, chrétiens et étrangers se confondaient. Ils étaient considérés comme les ennemis de l’Empire.

Le Japon féodal vivait donc systématiquement isolé de l’Europe et uniquement en relation avec le vieil Empire chinois dont il avait tiré sa civilisation première, lorsque, au mois de juillet 1853, la flotte américaine du commodore Perry jeta l’ancre près d’Uraga, petit port à l’entrée de la baie de Tokyo. Se débarrassant de tous les obstacles placés sur sa route, Perry remit aux représentans du shogun la lettre du président Fillimore, demandant l’ouverture de relations internationales. De là il se rendit aux îles Luchu et en Chine, puis revint le printemps suivant chercher la réponse. C’était le traité de Kanagawa signé le 31 mars 1854. Il ouvrait au commerce américain les ports de Shimoda et d’Hakodaté et assurait un bon traitement aux naufragés. D’autres traités furent ensuite passés avec différentes nations de la chrétienté. Bientôt les ports de Yokohama et d’Hakodaté furent ouverts. En 1860 et en 1861, le shogun envoya des ambassadeurs aux Etats-Unis et en Europe. La cour de Tokyo, quoique peu informée de la civilisation occidentale, en savait assez pour se rendre compte qu’elle était hors d’état de résister. Il fallait donc céder momentanément, et le peuple prêt à se soulever sut ceci : « La terre des Dieux ne sera pas polluée par l’étranger. Plus tard, les ports seront fermés à nouveau et les barbares expulsés. » La situation difficile pour la cour impériale se compliquait de l’action indépendante de certains daïmyos. Le prince de Choshu, agissant, croit-on, d’après les indications secrètes de l’entourage de l’Empereur, fît canonner les vaisseaux appartenant à la France, à la Hollande et aux Etats-Unis. La conséquence fut le bombardement de Shimonoséki, principal port de mer de la principauté de Choshu. Par solidarité, les Anglais s’y joignirent, et une indemnité de 15 millions fut exigée. Le shogun Yémochi tenta de punir le prince de Choshu pour