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Ledochowski, justement désireux que les petits Polonais comprissent le catéchisme, avait déclaré qu’il ferait appliquer la circulaire dans les classes supérieures, mais que, dans les petites classes, les lycéens polonais continueraient à entendre parler de Dieu en polonais. Les professeurs de religion, coupables d’obéir à l’archevêque, avaient été, le 1er avril, révoqués en masse par Falk. Le ministère, pour les remplacer, avait tenté de trouver des laïques : tous sauf un s’étaient dérobés. Et les petits Polonais avaient commencé de recevoir hors du gymnase l’enseignement religieux ; mais tout de suite l’Etat, s’irritant, avait châtié par des procès-verbaux les catéchistes bénévoles ; et puis, s’épanouissant dans ses attitudes violentes, il avait étendu à la Prusse orientale les mêmes ukases. C’est ainsi qu’au début de 1873 deux provinces du royaume voyaient Dieu régner dans les gymnases, s’il acceptait de parler tudesque, mais en sortir au contraire, et puis être traqué jusque dans les maisons ou jusque dans les chapelles, si, pour se révéler à des lycéens, il persistait à se servir du polonais. Au moment où les projets de lois ecclésiastiques allaient être l’objet, au Landtag, d’un vote définitif, les échos amplifiés de la grande émeute sacerdotale, qui là-bas en Pologne troublait l’enseignement secondaire, survenaient avec une savante opportunité.


IX

En cette journée du 9 mai, où les projets, mûris et acclamés, allaient devenir des lois, les orateurs du Centre élevèrent un cri suprême, qu’ils adressaient, non point aux parlementaires, mais au peuple. Excités et poussés à bout par l’imbrisable volonté de la majorité, ils apportaient dans les discussions une méthode nouvelle. Ce n’étaient plus des debaters, travaillant avec leurs collègues des autres partis pour l’élaboration d’une loi qui devait être l’œuvre commune d’une Chambre ; c’étaient des tribuns d’une minorité opprimée ; et de son banc, chacun de ces tribuns se faisait une chaire, pour agiter le pays. « Nous savons fort bien, déclara Mallinckrodt, que nous allons au-devant de jours pénibles. Il peut arriver facilement que nos sièges épiscopaux soient sans titulaires, que beaucoup de communes aspirent en vain à avoir un pasteur. Les dés en sont jetés. Nous ne pouvons pas, contre notre conscience, contre notre