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de premier ordre et 150 se prêteraient admirablement à la décoration des résidences impériales. Mais on était arrivé à l'automne de 1813, et les événemens se précipitaient ; le temps fit défaut pour exposer les tableaux espagnols. Dès le mois de mai 1814, Louis XVIII en ordonnait la restitution.


Avec une indépendance de goût fort rare parmi ses contemporains, Denon appréciait les primitifs italiens : il pensait et il disait que leur présence au Louvre était nécessaire « afin de compléter la collection impériale, qui maintenant est bien la plus magnifique réunion de l'Europe, mais à qui cependant il manque encore cette partie érudite et historique qui constitue réellement un musée. » Lors de la réunion de la Toscane à l'Empire, il signalait la convenance d'annexer aussi au Musée Napoléon « quelques peintres de l'école florentine, les plus anciens de la restauration des arts en Europe. » Il redoubla d'instances quand fut prononcée la suppression des couvens de la Toscane, du duché de Parme et des Etats Romains, tout en protestant que son ambition saurait se borner : « Vous pouvez, monseigneur, compter sur ma discrétion. Je ne demanderai jamais des tableaux de peintres dont nous aurions déjà des productions. »

A sa demande sans nul doute, il reçut en 1811 une double mission en Italie. Il devait d'abord parcourir les champs de bataille de la première campagne qui avait fondé la gloire du général Bonaparte, pour en joindre les croquis à ceux des guerres impériales. Mais en même temps, il s'était fait charger par Montalivet, le ministre de l'Intérieur qui partageait et secondait ses désirs, de visiter les monastères supprimés, depuis la Ligurie jusqu'aux Etats Romains, « afin d'indiquer à Son Excellence les objets d'art à conserver, ceux à laisser à la disposition du culte et ceux à abandonner au domaine pour être vendus. » Il fit douze cents lieues, séjourna assez longtemps à Rome, revint émerveillé et ravi, comme après ses voyages à la suite du quartier général : « Si le Musée Napoléon, monseigneur, peut obtenir de Votre Excellence que les tableaux dont j'ai l'honneur de lui adresser l'état lui soient envoyés, il n'aura plus rien à désirer. Il se trouvera complété par cette partie