Comme on a pu le voir par ses dernières lettres à Mme de Staël, M. Necker préparait depuis deux ans un grand ouvrage politique. En 1801, cet ouvrage était terminé, mais, d’accord avec sa fille, il en avait retardé la publication.
Si détaché que fût M. Necker de toute arrière-pensée personnelle, il ne pouvait se désintéresser de la France. L’avenir du pays qu’il avait aimé et servi le préoccupait, et c’était à la France qu’âgé de soixante-dix ans, il adressait ses Dernières vues de politique et de finances. « Oui, les dernières, disait-il dans la préface ; ce mot convient à mon âge et à ma santé qui s’affaiblit ; c’était même pour un temps au delà de moi que je destinais cet ouvrage en le commençant. Ce confident me plaisait : il m’était inconnu, et je pouvais, en imagination, le faire mon ami[2]. » Quelles raisons le déterminaient donc à anticiper cette publication, et à s’adresser non pas à l’avenir, mais au présent ? Ses lettres nous ont montré également que, dès le jour où la Constitution de l’an VIII avait été promulguée, il avait été étonné qu’une constitution, « ouvrage des siècles, » fut faite, comme un habit, à la mesure d’un homme. Pour cet