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IV

Le général de Ladmirault n’a pas reçu d’ordres ; il n’en a pas demandé. Sur cette seconde constatation, j’ai écrit quelque part[1] qu’il n’en avait garde, ne pouvant manquer de pressentir à quoi ces ordres eussent tendu.

M. Ollivier s’en indigne, cette fois contre moi, dont il trouve l’explication « inouïe ; » contre le général ensuite, dont, sans aller aussi loin dans ses appréciations, il trouve l’attitude, mettons distante, très coupable.

Restons d’abord dans le fait : on ne demande des ordres, quand on en a déjà, que lorsqu’on est en présence d’un fait nouveau de nature à les modifier. Le cas se présenta-t-il pour nous dans cette journée du 16 août ? Elle commence par une longue marche, sans aucun incident, pour gagner l’étape assignée. A ses approches on rencontre des vedettes ennemies : ce n’était une surprise pour personne, pas plus à l’Etat-major général que pour nous. On les refoule et l’on atteint une hauteur d’où l’on voit le passage sur la route de Gravelotte à Mars-la-Tour chaudement disputé à la colonne de gauche de l’armée française. On marche à son canon, on prend contact avec ses unités les plus voisines, qui sont elles-mêmes en communication avec le commandant en chef, et l’on appuie leur développement d’une manière si complète, qu’à un moment les troupes se rejoignent. — C’est là ce que M. Ollivier appelle « agir comme un commandant en chef isolé. » — A mesure que celles du 4e corps débouchent sur la ligne de bataille, elles la prolongent vers la droite, débordant ainsi jusqu’au-dessus de Mars-la-Tour le corps ennemi qui barrait la route. Il faut se bien rappeler que c’est le fait d’un seul corps d’armée ennemi. Déjà ses flanqueurs étaient refoulés par notre division de tête, quand celle d’un autre corps d’armée allemand vient à la rescousse. Nous y faisons face, nous lui brisons la tête, et nous restons, la journée finissant, sur la position.

Tout cela ne se passa pas dans une musette, ni sans donner à l’état-major du 4e corps quelque occupation, tandis qu’il y avait un gros état-major général pour y venir voir, qui ne s’en

  1. Le général de Ladmirault à Rezonville, Revue hebdomadaire, 5 août 1911.