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rouge. On posa au centre une statue de Bouchardon, terminée depuis 1746, et qui représente l’Amour taillant son arc dans la massue d’Hercule. (Il n’y a plus aujourd’hui qu’une copie de l’original, qui est au Louvre.) Le haut de la coupole porte un grand trophée, formé des attributs de l’Amour, carquois, flèches liées de rubans et de guirlandes, torches, couronnes de roses. L’Ile fut plantée d’une quantité d’arbustes odoriférans et de rosiers ; on y remarquait les pommiers de paradis et les rosiers pelote-de-neige. Les ponts de planches étaient garnis de caisses de fleurs, et quelques grands arbres, dans l’île même, jetaient leur ombrage autour des colonnes. Le Temple de l’Amour, à Trianon, est le meilleur exemple de ces sortes de monumens ; il nous apparaît encore comme une vivante évocation de l’Antiquité, telle qu’un temps frivole aimait à se l’imaginer.

Aussitôt après le Temple, Mique commença le bâtiment du Théâtre. En 1780, les communs furent transformés et agrandis, pour faciliter les séjours de la Reine. Cependant continuaient sous ses yeux, autour du lac, les aménagemens les plus importans. Le rocher avait été très difficile à édifier. Marie-Antoinette n’exigea pas moins de quatorze modèles avant d’en approuver un. On y travailla pendant toute l’année 1781 et une partie de l’année suivante, probablement sur un projet d’Hubert Robert, qui fut encore plusieurs fois remanié. Derrière le décor, réunies dans un réservoir qu’on a conservé, les eaux pouvaient descendre en torrent dans le lac ; les descriptions comme celles du chevalier Berlin, les estampes, les dessins l’indiquent et il serait sans doute avantageux de rétablir ce qui faisait la vie de ce petit paysage artificiel. La roche s’ombrageait de pins, de thuyas, de mélèzes, et le pont rustique avait l’ambition de rappeler, nous apprend le comte d’Hézecques, ceux qu’on rencontre u dans les montagnes de la Suisse et les précipices du Valais. » Les plantations voisines du rocher étaient alors disposées pour qu’on pût voir, des fenêtres du château, tout le motif, de même qu’on apercevait le Temple de l’Amour d’une autre façade.

On avait mis successivement sous les yeux de la Reine sept modèles pour la Grotte. L’état d’abandon où se présente aujourd’hui cette construction singulière, enfouie sous une butte voisine du lac, ne permet guère de juger des agrémens qu’elle pouvait offrir. Elle est fort étroite, d’une importance bien moindre que la grotte de Mesdames à Bellevue ou celle de