Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 23.djvu/120

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quoique se trouvant en grande quantité dans l’estomac, que si les animaux étaient absolument réfractaires, quelles que soient les espèces, les races considérées, cela devait être dû à ce fait que le vibrion se trouvait en présence d’autres bactéries extrêmement nombreuses et diverses dans le tube digestif, et que ces bactéries devaient, par leur présence ou leurs sécrétions, favoriser ou annihiler le développement du vibrion, de même que certaines plantes arrêtent ou favorisent la culture d’autres espèces.

Il y avait antagonisme dans la flore comme dans la faune. M. Metchnikoff supprime cette question ; il se débarrasse de la flore en expérimentant sur des lapins nouveau-nés qui ne se nourrissent que de lait maternel, et dont par suite le tube digestif ne contient, pendant les premiers jours après la naissance, qu’un nombre infime de microbes.

Dans ce cas, les petits lapins qui ingèrent des vibrions cholériques meurent dans une grande proportion. Allons plus loin : M. Metchnikoff étudie l’action de beaucoup de bactéries vis-à-vis du vibrion cholérique et voit que certaines vivent, pour ainsi dire, en bonne intelligence avec ce vibrion et favorisent son développement, et que d’autres, au contraire, l’arrêtent. L’association de bactéries favorables au vibrion cholérique donne plus certainement encore aux petits lapins nouveau-nés, le choléra.


Le problème en était là, lorsque la question fut reprise par MM. Violle et Poitevin. Ils furent frappés de ce fait que, dans une épidémie, lorsqu’on venait de donner à un individu sain un purgatif, ce sujet contractait à coup sûr le choléra. De très vieilles observations puisées dans l’antiquité relataient ce fait. D’autres témoignages le confirmaient ; la vieille sentence : « il est mort de peur » n’est pas absolument ridicule. Un individu qui, en temps d’épidémie, est angoissé, cerné de toutes parts par des cadavres, hypnotisé par ce fait qu’il peut d’un moment à l’autre avoir une diarrhée mortelle, contracte la diarrhée. C’est une diarrhée nerveuse, diarrhée de suggestion, peu importe le mot, en tout cas il a la diarrhée. C’est une diarrhée émotive comme chez le soldat jeune qui voit pour la première fois le feu.

Rappelons l’expérience faite l’an dernier en Allemagne pour démontrer le rôle de l’émotivité chez des hommes tout à fait indemnes.

Des soldats sont réunis dans la cour de la caserne. Le colonel arrive, suivi du médecin-major et dit aux soldats qu’un des leurs vient de