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Gerberge, mais la lutte qu’il avait à soutenir contre les Robertiens paralysa son action.

Est-ce à dire, comme on l’a avancé, qu’il ait fait à Otton Ier abandon de la Lorraine ? Loin de là. Malgré la coalition qui l’a contraint à chercher un refuge passager en Bourgogne, il revient à la charge vers la fin de 940, il envahit la Lorraine où l’appellent une nouvelle révolte des Lorrains contre le roi de Germanie et l’expulsion par eux du frère d’Otton, établi duc sur eux. Une simple trêve fut conclue ensuite entre les deux souverains, une trêve et non pas un traité ; et ce fut si peu un abandon ou une cession de la Lorraine que le duché fut confié à Ricuin, fils de cet Otton de Verdun qui, l’an d’auparavant, avait fait hommage au roi de France.

Cette trêve ne fut convertie en paix que deux années plus tard, à Visé-sur-Meuse, et cette fois encore nulle renonciation quelconque ne fut consentie, mais, selon l’usage, la paix fut assurée par un pacte d’amitié et d’alliance.

C’était trop encore au gré des Lorrains. Otton Ier ayant institué pour duc le Franconien Conrad le Roux, les Lorrains se soulèvent et tout se rompt entre les deux rois. Ils ne se rapprochent à nouveau que grâce à la captivité de Louis d’Outremer, livré par les Normands à Hugues le Grand.

Il est d’évidence qu’allié d’Otton Ier, Louis d’Outremer s’est vu dans la nécessité de ne pas soulever la question lorraine. Il y a eu remise, temporisation : d’abandon, point. Les Lorrains ne se sentent pas même liés par cette alliance. En 951, le fidèle du roi Régnier entre en lutte avec le duc Conrad, et, deux ans plus tard, lors des dissensions qui éclatent entre Otton Ier, son frère et son gendre, les Lorrains prennent les armes pour récupérer leur indépendance nationale.

II

La mort prématurée de Louis d’Outremer permet une mainmise de la Germanie non seulement sur la Lorraine, mais sur la France. Lothaire Ier n’est âgé que de treize ans, et tombe sous la tutelle, puis sous la régence de son oncle Brunon, le frère d’Otton Ier, dont celui-ci avait fait, en 953, son alter ego en Lorraine et contre lequel les Lorrains se révoltent violemment en 957. Régent de la France, archiduc de la Lorraine, Brunon