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comme la musique et les arts graphiques, nous permettent de lutter à armes égales. Fidèles à leur tradition, les éditeurs français ne sauraient pas demander plus, mais ils ne peuvent, sous peine de mort, demander moins.

A ce Congrès du Livre, dont nous attendons beaucoup, l’Université de France a bien voulu venir prendre place et faire entendre sa voix. Par la bouche de ses doyens et de ses professeurs, elle nous a livré ses idées sur les sujets qui l’intéressent plus particulièrement. La catégorie des textes classiques, grecs et latins notamment, où nous sommes encore pour une trop grande part tributaires de l’Allemagne, nous a valu un excellent rapport de MM. Strowskiet René Pichon. M. Petit-Dutaillis a, d’autre part, fort judicieusement établi devant les éditeurs de France que le progrès de nos exportations à l’étranger demeurerait en fonction de notre expansion intellectuelle. N’était-ce pas dire du même coup que, pour le succès du livre français, l’Université peut beaucoup ? Jadis elle exerçait une surveillance sévère sur notre corporation, elle planait en quelque sorte au-dessus d’elle. Si le temps n’est plus où elle réglait la circulation des livres, fixait les taxes de vente ou de location, obtenait pour les libraires et les « stationnaires » l’exemption des impôts, du guet et de la garde des portes, les couvrait en toute occasion de sa sollicitude, elle n’en reste pas moins à jamais la grande directrice de la jeunesse française, la plus sûre conseillère, la meilleure collaboratrice des éditeurs. En attirant à elle les étudians étrangers, en envoyant hors de France ses maîtres de conférences et ses professeurs, c’est elle qui saura le mieux donner au monde le goût de notre littérature, l’amour de nos idées.

Certes, au lendemain de la victoire, le rayonnement de la France sera prestigieux ; mais pour l’entretenir et le propager, il nous faudra développer inlassablement nos relations littéraires et scientifiques avec l’univers. Nos professeurs seront les pionniers du livre français. L’Université tiendra à honneur de nous aider dans notre tâche. Notre devoir à nous est de perfectionner nos procédés de fabrication, d’organiser fortement notre commerce, et de lui gagner sur les marchés du monde la place qu’il mérite.


LOUIS HACHETTE.