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seigneuriale, il se montrait, entre familiers, avec les ornemens royaux qu’il s’habituait à porter.

Sa petite-fille, mariée au comte de Guines, greffe la seigneurie sur un autre arbre, issu d’un très vieil estoc, dont les racines plongeaient loin dans la terre et dans le temps.

Cette seconde maison de Coucy, cette seconde dynastie, peut-on dire, occupe toute la durée du quatorzième siècle. Ses représentans relèvent et continuent les armes d’Etat de la seigneurie, le « fascé de vair et de gueules de six pièces. » Le nom d’Enguerrand leur est commun. Ils prennent femme dans la famille royale d’Ecosse, chez les Habsbourg d’Autriche, à la cour d’Angleterre. La figure d’Enguerrand VII, le dernier, se dessine sur un fond mouvementé d’aventures.

Otage en Angleterre, pour assurer la rançon de Jean le Bon, il en revient marié à la seconde fille du roi Edouard. Gêné désormais pour combattre en France les armées de son beau-père, il se jette en Italie, dans les querelles milanaises. Sa mère était Catherine de Habsbourg, fille de Léopold d’Autriche, qui avait disputé la couronne impériale aux maisons de Luxembourg et de Bavière. A la tête d’une expédition française, il va revendiquer les droits qu’il tenait de son aïeul. Il refuse l’épée de connétable. Il brille comme négociateur, en Bretagne, à Paris, en Aragon. Mais toujours l’Italie l’attire. Il y redescend avec le duc d’Anjou, prétendant au trône de Naples, aux côtés du duc de Bourbon, qui prépare à Gênes son expédition d’Afrique, pour le duc d’Orléans dont il appuie les combinaisons politiques. L’occasion survenant, il se croise contre le Turc. C’est le drame final de sa vie. A Nicopolis, Bajazet anéantit l’armée chrétienne. Enguerrand, prisonnier, passe les Dardanelles, avec quelques rares captifs épargnés, et va mourir de maladie sur la terre asiatique, à Brousse, capitale du Sultan qui guette de là Constantinople chancelante et encerclée.

Il ne laissait que deux filles. Louis d’Orléans, déjà maître de Pierrefonds, acheta à l’une sa part qui revint à la couronne avec Louis XII, tandis que celle de l’autre, tombée après la vente, par droit de succession, dans les héritages de la maison de Bar, passait par alliance à celle de Luxembourg, puis à la branche vendômoise des Bourbons entre les mains de qui la recueillait Henri IV.

Enguerrand VII et le duc d’Orléans avaient porté à sa plus