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l’embarquement des mousses à bord de nos navires, contrarie par les exigences scolaires, ne sera bientôt plus possible. Nous aurons ainsi détourné de la mer de jeunes énergies qui ne demandaient qu’à s’y consacrer. La Bretagne, cette pépinière de notre flotte, ne fournira plus de marins. D’autres que nous ont déjà poussé le cri d’alarme au sujet de cette désaffection de la population côtière des vocations maritimes.

Dans un autre ordre d’idées, la loi oblige parfois les armateurs à embarquer un personnel surabondant. C’est ainsi que l’interprétation qui a prévalu jusqu’ici aboutit à placer sur nos navires des soutiers que les navires étrangers similaires et effectuant les mêmes voyages n’ont pas, ou ont en moins grand nombre. Les effectifs des navires français, qui étaient déjà supérieurs à ceux des bâtimens étrangers, ont été encore accrus de ce fait. Aux termes de l’article 25 de la loi de 1907, le service du personnel des machines doit se faire par trois bordées, non seulement dans la navigation au long cours, mais aussi parfois dans la navigation au cabotage. Dans tous les autres pays, le service à trois bordées n’est appliqué qu’à la seule navigation au long cours.

N’insistons pas davantage pour passer à un autre sujet : celui du repos hebdomadaire. Une comparaison entre les législations française et étrangères fait ressortir que les dispositions de la loi française, concernant le repos hebdomadaire obligatoire, sont les plus dures. Dans la séance du 20 décembre 1909 du Conseil supérieur de la Navigation maritime, M. le sénateur Chautemps a déclaré que la Commission de la Marine du Sénat, dont il avait été rapporteur, n’avait pas cru pouvoir aller au delà sans mettre le pavillon français en infériorité. Mais, lorsque la loi entra en vigueur, les inscrits maritimes de Marseille soutinrent que le repos hebdomadaire, s’il n’avait pu être accordé en raison des nécessités du service, devait être compensé, soit par des allocations supplémentaires, soit par un nombre de jours de congé avec solde, accordé au port d’attache ou dans les escales et équivalent au nombre de jours qui ont été supprimés.

La sentence Ditte, rendue le 3 juillet 1909, donna gain de cause aux inscrits maritimes, au grand étonnement des inscrits eux-mêmes : au surplus, elle ne lie que les armateurs ayant adhéré au compromis d’arbitrage, c’est-à-dire ceux de Marseille,