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revient de son voyage de noces, de ce voyage où elle a eu le tort impardonnable de ne correspondre avec ses parens que par cartes postales. Combien différente de notre petite Suzanne d’autrefois ! Elle est dans la maison où elle a toujours vécu, et on dirait d’une étrangère. Elle chuchote à voix basse avec son mari, ce qui, en effet, n’est guère bien élevé. Et ayant avisé, dans la salle à manger de ses parens, un bahut qui ferait joliment bien dans la sienne, elle se le fait offrir. Ainsi elle dépouille ses vieux parens... Est-ce que cela ne vous fait pas frémir ? — L’autre scène est plus forte, va plus loin, et ne nous donne aucune envie de sourire. C’est la scène décisive entre la mère et le fils. Cette scène qui s’imposait, et qui nous a échappé à l’acte précédent, la voici venir, Devant ce fils qui s’enfonce dans sa dureté, dans son impertinence, dans son hostilité à l’égard des siens, la pauvre femme n’en est plus aux reproches. Elle essaie de le reconquérir par la tendresse et fait appela sa confiance. Elle le devine triste : qu’il lui dise son chagrin, comme autrefois ! Et l’affreux petit bonhomme étale en effet le fond de son âme, de sa vilaine âme, une âme de noceur, mais surtout de si parfait crétin ! Il a pour maîtresse une vague théâtreuse, personne d’excellente famille, cela va sans dire, qui ne vit pas avec ses parens, mais c’est qu’elle a besoin de calme pour travailler ses rôles. Elle seule « comprend » Max et elle n’aime que lui. Tout serait pour le mieux, n’était un affreux cabot qui donne des inquiétudes à cet amant délicat. Que faire ? Que résoudre ? L’intelligence surmenée de ce jeune idiot se consume dans cette recherche et sombre dans ce mystère... Cependant la malheureuse mère, qui s’est forcée à ce rôle de confidente, ne peut en soutenir jusqu’au bout la contrainte. Devant ce déballage de sottise et d’ignominie, — et c’est là son fils ! — elle ne peut retenir une exclamation de dégoût et réprimer un haut-le-cœur. Fureur du petit qui invective sa mère, lui reprochant de l’avoir attiré dans un piège, d’avoir crocheté son secret, et sort en faisant claquer les portes. Voilà. Ce n’est plus le noceur, ce n’est plus le paresseux, le carottier, le débauché : c’est le mufle !

Nous ne le reverrons plus, et c’est tant mieux. L’auteur a pratiqué entre la répétition générale et la première, un changement des plus heureux et dont on ne peut que le féliciter. Dans la première version, Max, qui est au régiment, revenait un soir en permission et, pour ne pas rencontrer sa mère, devenue veuve et qu’il n’a pas vue depuis plusieurs jours, s’esquivait par l’escalier de service. Non, en vérité, c’était trop. Nous avions assez vu ce jeune drôle ; enlevez-le !