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doivent également fournir un appoint important, si les ministres intéressés le veulent et savent imposer vite leur volonté, en balayant, au besoin, les barrages bureaucratiques et les réseaux barbelés des longues formalités réglementaires qui pourraient être placés en travers.

Une utilisation plus judicieuse de la main-d’œuvre des prisonniers de guerre peut également apporter ici un contingent précieux. On a trop longtemps et trop souvent considéré que le travail des prisonniers était uniquement destiné à les occuper, sans se soucier de savoir si leur travail était utile ou non, et c’est ainsi qu’on ne les a pas, autant qu’il aurait fallu, consacrés à l’agriculture. Tout cela heureusement s’améliore peu à peu, et pour peu que la guerre dure encore cent ans, il n’est aucune partie de notre administration, si bien cachée soit-elle derrière ses toiles d’araignée, qui ne finisse par savoir qu’une nation qui combat pour sa vie a droit qu’on lui épargne des attentes trop longues sur la molesquine des antichambres.

Il est enfin une classe de travailleurs qui peuvent constituer un contingent précieux, ce sont les milliers de combattans qu’une blessure légère a arrachés pour un temps aux champs de bataille et qui peuvent dans les champs pacifiques retrouver leur santé affaiblie et l’usage intégral de leurs membres. Mais ce serait aborder par son tout petit côté l’importante question de la rééducation des blessés de guerre que de la juger d’abord du point de vue utilitaire de notre production agricole. Celui-ci ne doit être que secondaire, et il faut avant tout considérer la santé et l’avenir des glorieux meurtris de la guerre qui priment ici toute autre préoccupation. C’est cette face de la question que je voudrais envisager maintenant.


C’est par centaines de mille... pour ne pas dire plus... que se comptent, dans chacune des grandes nations belligérantes, les blessés que le champ de bataille envoie sur les hôpitaux pour que ceux-ci en refassent, sinon de nouveau des combattans, du moins des hommes utiles à la société et qui ne lui soient point des poids morts. L’ordre de grandeur des chiffres précédens suffit à montrer quelle est l’importance pour le pays de la destinée faite aux blessés de la guerre.

On sait aujourd’hui — et dans presque toutes nos familles, hélas ! — que lorsqu’un blessé sort des mains du chirurgien avec ses plaies cicatrisées, il n’est pas encore pour cela véritablement guéri : les plaies fermées ont laissé après elles des muscles diminués ou disparus,