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Comme chaque fois qu’on trouve un nouvel agent physique les médecins s’empressent de l’expérimenter sur leurs cliens, il s’ensuit qu’avec les nombreux phénomènes et rayonnemens physiques nouveaux qu’on a découverts depuis quelques années dans les laboratoires, la physiothérapie s’est notablement développée. Elle comprend aujourd’hui, outre le massage, la mécanothérapie, l’hydrothérapie, la thermothérapie, l’électrothérapie, la radiothérapie, la radiumthérapie, la kinésithérapie... j’en passe et des meilleures, et je m’excuse de devoir emprunter tous ces termes un peu moliéresques au jargon de la Faculté ; mais nous n’en avons point d’autres, les poètes ayant bien à tort évité de traiter jusqu’ici ces sujets et de les doter de mots plus élégans.

Si on parcourt un centre de physiothérapie, celui de l’hôpital du Grand Palais par exemple, qui est un des plus ingénieusement installés et des plus complets, on est frappé par la variété des appareils qui y fonctionnent. Ici dans la salle de mécanothérapie s’alignent les engins les plus divers mus, les uns par un balancier, d’autres par une manivelle, d’autres encore par un moteur électrique. Ils sont construits pour faire exécuter passivement (je souligne à dessein) des mouvemens corrects aux articulations paresseuses. L’un élève le bras, un autre l’étend, un autre le fléchit ; plus loin, des poignets sont mobilisés, des doigts fléchis, des genoux pliés par les machines que surveillent et règlent les médecins et infirmiers. Ailleurs des douches d’air chaud, des plaques chauffantes, des bains de lumière, ailleurs encore des machines à courans galvaniques et faradiques ou seulement statiques, des appareils de haute fréquence, des tables d’électro-diagnostic, triturent les corps des blessés suivant les rites de la thermothérapie, de la photothérapie ou de l’électrothérapie. Ailleurs les ampoules radiologiques tendent dans un clair, obscur leurs ventres verdâtres et phosphorescens gonflés de vide...

L’accumulation de tous ces engins bizarres donne un peu, et bien à tort, l’impression de je ne sais quelles chambres de tortures médiévales. Qui de nous n’y a vu, admiré... et peut-être plaint un peu, nos blessés tournant et s’agitant sur place parmi ces étranges instrumens, comme des écureuils dans leur cage grillagée, l’esprit et le corps tendus dans un fatigant effort ?

Et pourtant ces installations ont rendu entre des mains habiles de signalés services ; c’est par millions que se comptent les sommes économisées par elles ; c’est par dizaine de milliers que se comptent les blessés impotens rendus ainsi capables de marcher et de travailler.