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Si nous examinons maintenant les résultats obtenus, on constate d’abord que la santé locale et générale des patiens se refait très vite. L’appétit, le sommeil, la gaîté renaissent joyeusement ; le plaisir de se retrouver dans un milieu familial, d’y faire œuvre utile à soi-même et aux autres, le sentiment de n’être plus un homme « fini, » ou du moins diminué, régénère ceux que la souffrance et le séjour à l’hôpital avaient déprimés. Ce sont, suivant l’expression d’un témoin, de véritables résurrections.

Au point de vue pratique, deux chiffres soulignent, mieux que tous commentaires, la valeur des résultats obtenus :

1° Plus de 90 pour 100 des blessés traités à Martillac par le travail agricole continu ont été récupérés pour le service militaire.

2° 28 000 journées ont été fournies par ce petit hôpital aux agriculteurs du canton de la Brède ; aussi ce canton, par l’état florissant de ses cultures, présente un contraste saisissant avec les cantons voisins où la méthode n’était pas appliquée.

Ces journées faites aux champs, la contribution des blessés à la culture des terres délaissées ou incultes n’est certes qu’un effet secondaire, ou, suivant l’amusante expression du professeur Bergonié, qu’un sous-produit de cette usine à guérir qu’est la station de physiothérapie agricole. N’y eût-il que ce sous-produit économique, la supériorité du rendement de ladite usine sur celui des dépôts antérieurs de mécanothérapie serait encore à considérer. Mais tout y est réuni : les conditions physiologiques les meilleures, le milieu le plus hygiénique moralement et physiquement, le rendement plus élevé en guérisons plus complètes, une contribution à l’agriculture chaque jour plus précieuse, enfin une charge pour le service de santé et pour le trésor sensiblement allégée. Et c’est, ainsi que, lorsque récemment le sous-secrétaire d’État du service de santé a visité la station de Martillac, il a eu la surprise paradoxale de trouver un hôpital vide... et pourtant rempli, mais dont les pensionnaires étaient aux champs.

Notre ministre de l’Agriculture, M. Fernand David, a été vivement frappé par les résultats concluans de ces deux ans d’expériences communiqués à l’Académie des sciences par le professeur Bergonié, et avec sa netteté de vue et sa décision coutumières, il a aperçu tout le profit qu’en les généralisant le pays tout entier pourrait en tirer. — Il a sur ce sujet communiqué ses vues à M. Justin Godart, avec qui il s’est mis facilement d’accord, et je suis en mesure d’annoncer qu’à très bref délai des mesures d’ensemble vont être prises pour que, dans tous les cas où cela est possible, dans toute la France, la physiothérapie agricole