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Le brouillard est toujours épais. L’avion de commandement vient survoler nos lignes à moins de cinquante mètres de hauteur. A peine les tirailleurs le distinguent-ils, mais ils entendent le bruit du moteur. Alors un clairon, pour avertir l’aviateur, sonne la marche du régiment et exécute la sonnerie Au drapeau. L’aviateur, renseigné, repart pour rendre compte.

Pendant que les tirailleurs organisent la première position conquise, le bataillon des zouaves, qui les suivait à 200 mètres, les rejoint, franchit la crête qu’ils occupent et se porte d’un seul élan sur le village de Douaumont dont il s’empare et de deux sections et demie de mitrailleuses placées en avant et à une soixantaine de mètres de la lisière Nord, en liaison étroite avec le régiment colonial à droite et le 4e régiment de zouaves à gauche. Il est à peine trois heures du soir. Ainsi l’invraisemblable programme a-t-il été rempli à l’heure dite.

L’ouvrage de Thiaumont, le village de Douaumont : il a fallu tant de sang, d’efforts et de temps à l’ennemi pour prendre ces amas de ruines dont nous l’avons chassé si vite !

Sur sa hauteur, le fort de Douaumont domine tout le champ de bataille. Le voilà dépassé sur sa gauche. Mais que se passe-t-il à sa droite ?...


II. — DE LA BATTERIE DE DOUAUMONT AU RAVIN DE LA FAUSSE-CÔTE

Sur la droite du fort de Douaumont, dans le même temps, s’avance la division Passaga qui, pour son premier objectif, doit atteindre, au delà du fameux ravin du Bazil où passe la voie ferrée de Fleury à Vaux, la partie Sud du bois de la Caillette, la batterie de la Fausse-Côte et, sur le versant Sud de ce ravin, les pentes Nord et Est de la croupe de Vaux-Chapitre dont l’ennemi a gardé une partie en sa possession après les combats de septembre et qui faisaient saillant dans nos lignes. Ce premier objectif représente déjà un effort et un gain considérables, et la division Passaga est, des trois divisions d’attaque, celle qui a le plus long chemin à parcourir. De plus, à cause de ce saillant même, ses troupes sont disposées en équerre dans les tranchées de départ, en sorte que le départ est déjà une manœuvre : il faut se redresser sans confusion, calculer exactement les distances pour les bataillons accolés. A cette