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Le nombre des prisonniers, leur promptitude à se rendre étonnent et réjouissent nos chasseurs et nos biffins. Voici un capitaine qui ne sait pas ce qu’est devenue sa compagnie : « Ne t’inquiète pas, lui dit familièrement un vitrier, tu la retrouveras à Verdun ; on te la rassemblera. » Il y en a de tout jeunes qui se mettent à pleurer. L’un d’eux, presque un enfant aux joues roses, qui porte à peine quinze ou seize ans, se précipite sur le chef de bataillon du 102e qu’il vient d’apercevoir et se jette à ses genoux en joignant les mains. Touché de sa jeunesse, le commandant Florentin lui tape sur la joue en riant : « Pauvre gosse, va-t’en, nous ne faisons pas la guerre aux moutards. » Et le petit Boche, rassuré, s’en va solliciter des corvées. Sans les officiers qui les maintiennent, ils n’opposeraient guère de résistance. Dès que les chefs sont blessés, la défense mollit. — A un moment donné, raconte-t-on au 102e, la résistance ne tient plus qu’à la présence d’un grand officier qui se démène comme un diable et excite tous les courages. Il est partout à la fois. Tant de bravoure mériterait qu’il fût épargné et simplement fait prisonnier. On l’invite à se rendre : peine perdue. Il faut le tuer. Le chasseur Billefod s’adresse à son chef de section : « En voilà assez ! je vais le descendre. » Il se redresse dans son trou d’obus et l’étend d’une balle à la tête. C’est fini : le bataillon entier se rend. Le lieutenant Petit, qui commande la 2e compagnie engagée sur ce point, se porte auprès du mourant. Ce dernier murmure en français à peu près ceci : « Je suis vaincu, vous êtes des braves ; voici mes papiers et ma croix de fer ; faites parvenir le tout à ma famille. » Le lieutenant Petit donna sa promesse.

Le deuxième objectif atteint, les chasseurs dansent et jonglent avec leurs fusils. Un long cri retentit : On les a ! Le passage d’un groupe d’avions volant très bas achève de les enthousiasmer. Le bruit des moteurs empêche d’entendre les passagers, mais on voit le geste de leurs mains qui applaudissent. C’est la gloire qui vient d’en haut, comme dans les légendes.


A la droite de la division, en liaison avec la division de Lardemelle, le groupement Doreau (107e bataillon de chasseurs et 401e régiment) doit enlever les pentes Nord et Est de la croupe de Vaux-Chapitre, puis gravir les pentes Nord et Est