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ne se contenta pas de régler avec soin et méthode, pour tous les exécutans, l’économie des divers dispositifs d’attaque, ni de pousser à la perfection le dressage individuel des fusiliers, des voltigeurs et des autres spécialistes ; il fit de son bataillon un seul être à mille têtes. « La désignation dont il était l’objet, a-t-il écrit, l’enthousiasmait, sans qu’il se fît illusion sur les difficultés qui l’attendaient, ni sur les droits équivalens des autres bataillons du régiment à un choix aussi désirable. » Chaque soldat sait ce qu’on attend de lui, mais entend concourir au but commun. Il n’y a plus de volontés individuelles, mais une volonté collective réglée par le chef. Le commandant et ses officiers ont pris langue avec les officiers du 129e régiment qui sont entrés dans le fort le 22 mai : conférence utile pour éclairer la nouvelle équipe sur les précautions essentielles à prendre, et qui rapproche le but en le montrant possible, puisqu’une première fois il a été réalisé, bien que sans lendemain. Les photographies du fort par avions ont été minutieusement étudiées ; officiers et gradés ont été conduits en automobiles jusqu’à d’autres forts similaires de la région de Verdun qu’ils ont visités. En somme, conclut le commandant, « toute l’affaire se présente bien, solidement montée, soumise à la chance comme tout projet de bataille, mais à une chance qui valait dix fois qu’on la tentât. » Et de toute cette majesté de visionnaire qui émane de sa personne il contribue à répandre et à propager autour de lui la religion de Douaumont. Dans la religion de Douaumont communie tout le régiment colonial, composé d’élémens hétéroclites, où se mêlent classes, races, croyances, mœurs, accens : une même foi a fait ce miracle.

Le groupe d’attaque comprendra les 1re et 2e compagnies du 8e bataillon, la compagnie 19/2 du génie, la moitié de la compagnie de mitrailleuses, une section de lance-flammes, un groupe médical, médecins et brancardiers, un groupe de liaison, téléphonistes et signaleurs. Le fort de Douaumont, devant être abordé par son flanc Ouest et par sa gorge prise en oblique, est d’avance divisé, pour les assaillans, en deux secteurs, l’un comprenant surtout les superstructures, y compris le cavalier, l’autre comprenant surtout les casemates du rez-de-chaussée et le sous-sol. Au départ, le bataillon devait suivre le bataillon Croll à 100 ou 200 mètres de distance. Après le premier objectif atteint, ce dernier devait donc s’ouvrir pour