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Diot attend les renseignemens de ses patrouilleurs : la nuit est sombre, aucune fusée, aucun coup de feu, mais des barrages en arrière, vers les Carrières et le Petit Dépôt. Une escouade de coureurs est formée pour assurer les liaisons. Les patrouilleurs rentrent une heure plus tard : les abords et le fossé du fort sont libres.

Le lieutenant Diot, après avoir fractionné sa compagnie, la conduit au fort. Il y pénètre de sa personne avec le sous-lieutenant Lavève et le détachement du génie, non sans avoir éprouvé quelque difficulté à découvrir une ouverture. Il inspecte rapidement l’infrastructure qui est déserte. Des débris y fument encore, l’atmosphère y est presque irrespirable. Un peloton de sa compagnie est appelé à l’intérieur. L’autre monte sur la superstructure. Le lieutenant Labarbe et sa section trouvent, en haut, une issue par laquelle ils descendent et rejoignent les occupans. Le 3 novembre, à deux heures trente du matin, presque cinq mois après sa chute, le fort de Vaux est redevenu français. Le second captif est délivré.


Un jour entier, le fort est demeuré vide, et ce jour, le sort a voulu que ce fût la fête des Morts.

Les Allemands sont partis aux premières lueurs du matin, non pas dans la calme exécution d’un plan mûri qui s’accomplit à l’heure fixée, sans hâte, les préparatifs terminés à l’avance, mais dans la fièvre et la précipitation d’un départ improvisé qui ressemble étrangement à une fuite. De cette fuite le butin abandonné est la preuve : un million de cartouches, un millier de bouteilles d’eau minérale, trois mille boîtes de conserves, tout un matériel de fusils, de grenades, de lance-flammes, quatre mitrailleuses dont deux empaquetées, prêtes à être emportées. Comme à Douaumont, bien qu’en moins grande quantité, des papiers révélateurs ont été laissés ; parmi eux. une consigne, datée du 21 octobre, concernant la défense du fort en cas d’attaque. Les fuyards se sont bousculés. Ils ont pris leur résolution dans la nuit et ils ont voulu profiter des ténèbres. Ainsi n’ont-ils pas eu le temps d’accomplir toutes les destructions qu’ils eussent souhaitées. L’arrière-garde a promené au hasard la torche et provoqué çà et là l’incendie, même l’explosion d’un petit dépôt de grenades ou de cartouches.