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et le mariage suivrait promptement. A Copenhague, dans les milieux de la Cour, on gardait le secret sur ce projet ; mais, d’après les initiés, les informations auxquelles il donnait lieu étaient l’expression de la vérité.

Une autre circonstance tendait à prouver leur exactitude ; la famille royale qui, peu de temps auparavant, se proposait de résider en France durant quelques jours, avant de se rendre en Angleterre à l’invitation de la reine Victoria, venait de renoncer à passer par Paris ; elle irait directement à l’ile de Wight où elle était attendue. Ce changement d’itinéraire était attribué, d’une part, à la crainte qu’avaient conçue les souverains danois de provoquer, en voyageant, en France, les commentaires des journaux sur l’éventualité de ce mariage dont on entendait parler pour la première fois, et, d’autre part, à l’accord intervenu entre la famille royale et le prince impérial, aux termes duquel ils devaient se retrouver à la cour britannique.

Cette nouvelle, arrivée à Berlin au moment où Waddington allait quitter la capitale allemande, ne pouvait le laisser indifférent et ne pas l’émouvoir. Bien qu’il n’en eût pas la confirmation officielle, elle lui venait d’une source qu’il devait considérer comme sûre, et c’eût été de sa part un témoignage d’imprévoyance de ne pas mesurer dans toute son étendue le prestige dont se parerait aux yeux des Français le fils de l’Empereur déchu, en épousant la princesse Thyra de Danemark.

Il convient de rappeler quelle situation privilégiée et respectée avaient créée au roi Christian IX, dans l’aréopage des empereurs et des rois, bien qu’il n’y figurât que comme souverain d’un petit Etat, la dignité de sa vie, la pureté de ses mœurs, la sûreté de son commerce, les agrémens de sa cour, dont on disait que c’était une cour patriarcale, et surtout les alliances qu’à la faveur de la grâce captivante de ses filles aînées, Alexandra et Dagmar, il leur avait fait contracter. En 1863, neuf mois avant qu’il montât sur le trône comme successeur de Frédéric VII, et alors qu’il n’était encore que prince de Gluksbourg, la première épousait le prince de dalles, le futur Edouard VII. C’était sa mère, la princesse Louise, qui avait préparé ce mariage, en intéressant à son projet la princesse impériale d’Allemagne, sœur du jeune héritier de la couronne britannique. Celui-ci s’était promptement épris de l’élue de sa sœur, et le mariage avait été célébré, le 10 mars, à