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sans doute se faire oublier. Mais sa présence en Danemark excitait dès ce moment les commentaires de la presse et du public.

A Copenhague, l’opinion s’était d’abord montrée indécise. On se souvenait que, pendant la guerre de 1866, le Hanovre s’était fait le partisan des mesures les plus violentes contre le Danemark et qu’en 1848, ses troupes avaient soutenu les insurgés holstinois. Ces souvenirs n’étaient pas faits pour désigner aux sympathies populaires le fiancé de la princesse Thyra. D’autre part, on rappelait que la maison de Hanovre n’avait pas abdiqué ses droits, que récemment encore le prince les avait solennellement maintenus, ce qui donnait au mariage un caractère anti-allemand qui flattait le sentiment national danois. On n’en redoutait pas moins l’effet que l’événement produirait à Berlin et on eût voulu être rassuré de ce côté. On ne le fut complètement que lorsque le bruit se fut répandu que le prince impérial avait adressé des félicitations à la famille royale. Du reste, dans certains milieux, on inclinait à croire que le prince, à l’occasion de son mariage, renoncerait à la couronne de Hanovre et qu’en tout cas, il restait entendu que le ménage princier ne résiderait pas en Danemark, mais tantôt en Angleterre et tantôt à Pentzing, aux portes de Vienne, dans le voisinage de Schœnbrûnn, ou dans la Haute-Autriche, à Gmünden, propriété des Cumberland. Il semblait donc que le mariage accepté en Allemagne et entouré de précautions n’amènerait aucun refroidissement dans les relations germano-danoises. La pressa à Copenhague n’en recommandait pas moins la prudence et reproduisait, à titre d’avertissement, un article de la Post de Berlin dans lequel il était dit : « Le Danemark comprend trop bien son intérêt pour laisser une fronde guelfe s’établir sur son territoire. » Personne ne souhaitait qu’elle pût s’y établir et ne songeait à la favoriser.


II

A ce moment, se produisait un incident diplomatique qu’on aurait dû prévoir et qui sans doute n’eût pas troublé la joie de la famille royale, si Bismarck, empêché par la volonté de son souverain de laisser voir son mécontentement, n’eût pas saisi cette occasion de le manifester par la brutalité de son intervention. Il déclara ne pouvoir admettre que le gouvernement