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mais bientôt, on les oubliait. Lorsque le 27 février 1881, les jeunes époux firent leur entrée dans Berlin, ils furent acclamés, (lisent les comptes rendus de la solennité, par les cent mille spectateurs qui s’étaient portés sur leur passage. Une fois de plus, Guillaume Ier avait lieu de se féliciter, puisque le mariage de son petit-fils lui ramenait satisfait et même comblé un mécontent de la veille. Maintenant, parmi les princes de l’empire, plus ou moins victimes des événemens de 1850, il n’en restait qu’un, le duc de Cumberland, qui parût résolu à ne pas se réconcilier.

On sait qu’il a persévéré dans cette attitude jusqu’en 1913. Durant cette longue période, il a vécu tantôt en Angleterre, tantôt en Autriche, dans une intimité familiale où l’affection de sa femme payée de retour et l’influence qu’elle exerçait sur lui, auraient suffi à le dédommager des malheurs de sa maison, si la mort de son fils aîné, ne les avait aggravés, en vouant le père, et la mère surtout à une douleur inconsolable. A l’improviste, éclatait en Europe la nouvelle que leur second fils, devenu duc de Brunswick par le trépas de l’aîné, allait épouser la princesse Victoria-Louise de Prusse, fille unique de Guillaume II, empereur d’Allemagne.

Nous ne savons rien des négociations qui avaient précédé cet événement, si ce n’est qu’il était dû à l’initiative du grand-duc de Bade et que ce prince y avait pris la part la plus active. Jusqu’à ce jour, à Vienne, le duc de Cumberland s’était montré fort empressé auprès des représentans de l’Entente. Il les recevait, allait les voir, paraissait attacher du prix à ces relations.

« Il est sans prestige, écrit alors un voyageur qui passait quelques semaines en Autriche, mais bien intentionné, d’une simplicité d’allures qui impose la sympathie. Sa femme, la princesse Thyra, atteste plus que lui qu’elle est de race royale. Grâce à la vive passion qu’elle lui a inspirée et que l’âge n’a pas refroidie, elle l’a toujours dominé. Déprimée maintenant par son deuil de mère, elle fait effort pour reparaître dans les salons et, par affabilité, surmonter sa tristesse. Belle silhouette de reine sans couronne, vieillie prématurément par le chagrin. Je n’ai recueilli de sa bouche aucune parole qui mérite d’être retenue. »

Le mariage du jeune duc de Brunswick une fois résolu, les visites du père dans le monde diplomatique semblaient dictées par un besoin d’expliquer sa renonciation à son attitude de