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se garda d’user jusqu’au bout de cette faculté, de crainte de mécontenter les contribuables et de provoquer chez eux d’amères réflexions sur les exigences du pouvoir central. Il emprunta à jet continu pour équilibrer des budgets qui se soldaient régulièrement par un déficit. A la veille de la guerre, le capital de la Dette impériale atteignait cinq milliards de marks, soit six milliards et quart de francs.

Mais cela même n’avait pas suffi aux appétits dévorans du Hohenzollern qui avait toujours le mot de paix sur les lèvres, mais qui ne découvrait d’autre moyen d’en assurer les bienfaits à l’humanité que de forger la plus formidable machine de guerre que le monde eût connue. Il empiéta sur le domaine des impôts directs qui, par une sorte d’accord tacite, semblaient avoir été réservés aux Etats particuliers. Des droits de succession, un impôt sur l’augmentation de la fortune furent institués en faveur de l’Empire. Mais tout cela ne faisait pas rentrer assez vite dans les caisses du Trésor les sommes dont le Kriegsherr, le maître de la guerre, titre dont l’Empereur aime à se parer, avait besoin pour l’exécution de ses plans. Impatient d’accumuler dans ses arsenaux tout ce que ses ingénieurs et ses chimistes avaient inventé de moyens de destruction, il fit voter, en 1913, par un Parlement docile la fameuse contribution d’armement (Wehr Beitrag) qui fut comme le tocsin d’alarme nous annonçant ce qui se préparait. C’était un impôt sur la fortune et le revenu, prélevé à titre exceptionnel et payable en trois termes annuels : il devait fournir au moins un milliard de marks, entièrement absorbés par les dépenses militaires.

Telles étaient les conditions dans lesquelles l’Empire abordait la guerre. Les dépenses de celle-ci ont toutes, jusqu’à ce jour, été comprises dans un budget séparé, alimente par l’emprunt et constitué en vertu de votes de crédits globaux consentis par le Parlement et dont le total s’élève, à l’heure actuelle, à 79 milliards de marks. C’est ainsi qu’une loi du 4 août 1914 autorisait le chancelier à faire appel au crédit pour réaliser une somme de 5 milliards de marks et à émettre à cet effet des obligations ou des bons libellés en monnaie nationale ou en monnaies étrangères. Au même budget extraordinaire était versée la réserve métallique de l’Empire d’ensemble 300 millions, comprenant 240 millions d’or et 60 millions d’argent. Les budgets ordinaires sont maintenus pendant la guerre à peu près dans