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l’Ouest de Monastir. Peu à peu les tranchées provisoires, les ouvrages de campagne se hérissèrent de défenses et se garnirent de renforts. On supposa même, un moment, que les Bulgares allaient renverser les rôles. Mais le demi-succès de Roumanie, les hésitations du roi Constantin à prendre le parti auquel le conviaient de rusés conseillers, l’hiver approchant qui transformerait les plaines en lacs de boue et les montagnes en chaos inhabitable, plus encore que l’épuisement général ou les risques d’une offensive, ont maintenu les Bulgares dans des positions qu’ils améliorent chaque jour.

De notre côté, après quelques efforts dont la violence de plus en plus atténuée consacrait l’impuissance, on avait adopté une attitude d’attente, imposée d’ailleurs par les événemens. Le troisième acte de la campagne d’Orient se terminait donc sur un demi-succès. La presse française avait, un peu légèrement, transformé l’entrée à Monastir en victoire féconde. Monastir n’est pas encore la capitale provisoire d’une Serbie ressuscitée ; elle est sous le feu des canons bulgares qui ne la bombardent qu’à bon escient, et l’ennemi lance des flammes sur le sommet de la montagne 1050 pour en chasser nos amis italiens. Mais si beaucoup d’illusions ont été déçues, les espoirs justifiés nous restent. Les troupes hétéroclites du général Leblois étaient peu nombreuses. Elles ont pu cependant refouler un ennemi valeureux et bien organisé. Leur fière contenance a supprimé chez l’adversaire toute velléité d’un facile retour offensif. Les Bulgares ont exécuté avec une maestria incontestable une manœuvre en retraite qui leur vaudra les éloges des connaisseurs. Mais ils en auront moins d’orgueil quand ils connaîtront la force réelle des troupes qui les y ont contraints.


L’ARMÉE D’ORIENT

On a cru pendant longtemps que la machine militaire de l’Entente en Orient resterait en panne dans les environs du camp retranché de Salonique. La campagne dans le bassin de la Cerna prouve que ses rouages ont surmonté les résistances du point mort et qu’ils peuvent pousser en avant cette machine puissante, mais encore mal équilibrée. L’arrêt près de Monastir n’est qu’un incident de route, et le général Sarrail saura bien remettre quand il le faudra le moteur en mouvement. La course