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LA MER DÉSERTE


Entre les oliviers, la Méditerranée
S’étend déserte au pied des monts ; l’air est serein ;
C’est l’heure où s’attendrit le cœur du pèlerin,
C’est la chute du jour, le déclim de l’année.

D’une étrange clarté l’eau bleue est couronnée ;
Au loin, pas une voile à l’horizon marin.
Dans cette solitude immense, à ton chagrin,
Pauvre âme en deuil, ne te crois pas abandonnée...

Les astres qui vont luire au ciel sont moins nombreux
Que tout autour de toi l’essaim des bienheureux,
Des esprits fraternels, attentifs à ta plainte.

Évoque avec amour chaque ange qui t’est cher :
Soyez bénis, saints et martyrs !... L’angélus tinte...
Salut, Vierge Marie, étoile de la mer !


CLÉOBIS ET BITON


La nuit triste envahit le foyer solitaire ;
La brume de l’automne a voilé ciel et terre ;
Silencieuse et vide à présent, la maison
Frémit au vent glacé de l’arrière-saison.
Ses vitres ont flambé du perron jusqu’au faite
Au coucher du soleil, comme pour une fête,
Mais l’illumination trompeuse a peu duré,
Les choses ont repris leur deuil morne et sacré.
Mon âme alors dans le passé se réfugie,
Et mainte vision devant elle surgie.
Mainte légende apprise en la paix d’autrefois.
L’emportent loin du soir qui tombe sur les bois...
Voici les oliviers de l’Argolide antique,
L’air bleu qui joue autour des piliers d’un portique,
Des palmes ombrageant un temple au clair fronton
Où deux noms sont inscrits : Cléobis et Biton.