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les collèges de jadis différaient grandement de nos lycées actuels. Ce qu’on payait, dans les collèges, ce n’étaient point la science ni les maîtres, accessibles à tous les sujets du royaume, à quelque rang social qu’ils appartinssent, mais « la pension, » dont le prix variait, comme en toute hôtellerie, suivant le train et les exigences du pensionnaire. Car on tolérait es exigences : les riches avaient leur chambre, ou même un appartement composé de plusieurs pièces ; le précepteur choisi par la famille ne quittait pas l’enfant à son entrée au collège et s’y installait avec lui. Le 8 août 1786, quittance est donnée par M. Duval, proviseur et supérieur du collège d’Harcourt, pour « un quartier et demi, — quatre mois et quinze jours sans doute, — de la pension du jeune Montbreton, — plus tard Norvins, — et de « Monsieur son instituteur ; » la somme reçue est de 444 livres, ce qui n’est pas cher pour le logement, la nourriture et l’entretien de deux personnes durant la moitié de l’année scolaire[1]. À Louis-le-Grand, vers la même époque, la pension d’un élève est de 530 livres par an, « plus 48 livres une fois payées en entrant[2] ; » mais le chiffre s’augmente, bien entendu, si le pensionnaire débarque, comme le cas est fréquent, avec son précepteur et un ou plusieurs domestiques. Harcourt recrute la plupart de ses élèves dans la haute bourgeoisie et dans la noblesse de robe ; la noblesse d’épée et de cour envoie de préférence ses enfans à Louis-le-Grand, où certains mènent une existence quasi-fastueuse. Mais l’une et l’autre des institutions comptent également des externes, ou des pensionnaires appartenant aux familles du « Tiers » ou du commerce ; elles ont surtout leurs boursiers, et ceux-ci sont en si grand nombre qu’ils donnent le ton et font la loi à leurs camarades plus fortunés.

Le boursier, lui, ne paye pas pension : il est entièrement défrayé, et l’établissement qui l’héberge est désintéressé de ses

  1. Norvins, Mémorial, I, 10, note.
  2. Thierry, Guide de l’amateur et de l’étranger, 1787, II, 323.