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rencontrer que ses convictions. Ceux-là auraient bien peu vécu, et surtout ceux-là seraient bien peu chrétiens, qui ne sauraient pas aimer ceux qu’ils combattent. Mais ce n’est pas la question, et je me borne à dire que l’Académie est trop honorée en Europe pour que ceux qui la respectent puissent, sans une profonde douleur, voir l’athéisme y entrer de plain-pied. »

Et répondant d’avance aux reproches de passion, de colère, d(i parti pris qu’on pourrait lui adresser, Mgr Dupanloup ajoutait : « Si je manquais aux susceptibilités délicates de la bienséance fraternelle, et de la charité respectueuse envers les âmes, je me le reprocherais. Ou je me trompe, ou les écrivains que je combats seront les derniers à m’accuser, et pour deux raisons. Sans doute, ils sont mes confrères, mais je suis le leur, et si cette qualité ne les a pas empêchés d’attaquer mes croyances, elle ne saurait m’empêcher de les défendre contre eux. Puis je me borné à les interroger, et ils sont libres, — que dis-je ? — ils sont suppliés de me répondre. Je les ai lus et je crois et affirme, la main sur la conscience, que leurs théories détruisent Dieu, l’âme, la vie future, la loi morale. Si cela n’est pas, qu’ils se lèvent et qu’ils le disent !

« Je n’aurai jamais eu de ma vie une joie comparable à la joie dont m’inonderait ce démenti victorieux. »

En ce qui concerne Littré, Mgr Dupanloup disait : « Il a pénétré de ses doctrines un Dictionnaire de médecine renommé composé au commencement de ce siècle par deux savans honorables (Capuran et Nysten, deux spiritualistes), et qui se trouve maintenant, altéré par lui et corrompu, aux mains de toute la jeunesse des. écoles médicales. » Il en donnait maintes preuves pour la recherche des CAUSES PREMIÈRES et des CAUSES FINALES, « désormais reconnues inaccessibles et bonnes seulement pour occuper l’enfance et l’esprit humain ; » pour I’HUMANITÉ, transformée par elle-même en Providence, « après avoir trop longtemps compté sur d’autres Providences imaginaires ; » pour I’AME qualifiée « d’être immatériel supposé, tandis qu’elle n’est que l’ensemble des fonctions du cerveau et de la moelle épinière ; » pour I’AMOUR, appelé un « ensemble complet de phénomènes cérébraux ; » pour la SOCIABILITÉ, considérée comme ((un résultat de l’organisation animale et n’ayant pas d’autre cause, » etc. L’évêque d’Orléans ne pouvait supposer qu’au XIXe siècle, en Franca après le discrédit qui avait frappé les