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de la Revue des Deux Mondes et du Correspondant, auteur d’ouvrages estimés, tels que la Fondation de l’unité française, l’Histoire du Gouvernement représentatif, la Littérature française au XVIIIe siècle, mais on regrettait la façon dont il avait conquis les suffrages. C’était, disait-on « un prix de catéchisme. » Le Siècle tombait à bras raccourcis sur l’évêque d’Orléans qui prétendait créer l’orthodoxie dans le domaine de la littérature. L’élection du Père Gratry, deux ans après, exaspéra Sainte-Beuve qui écrivit à la princesse Mathilde : « L’Académie recueille ce qu’elle a semé... Nous voilà bien lotis avec ce nouveau confrère qui fait la paire avec le Dupanloup ! » Edmond Scherer écrivit dans le Temps que M. Guéroult, rédacteur en chef de l’Opinion nationale, qui avait approuvé la campagne de Mgr Dupanloup, pouvait être satisfait : l’évêque d’Orléans était devenu le grand électeur de l’Académie. « Il s’est trouvé, disait-il, trois ou quatre personnes à l’Académie assez étrangères au mouvement des choses et des idées de leur temps pour ne rien savoir de M. Littré que son nom et n’avoir appris aie connaître que par la vulgaire fantasmagorie des citations de M. Dupanloup. » L’écrivain déplorait ce résultat, « non pour M. Littré qui pouvait se passer de l’Académie, mais pour l’Académie elle-même, vouée à une décadence irrémédiable. L’évêque d’Orléans alléguait pour justifier sa campagne contre Littré son caractère épiscopal. Il oubliait que l’Académie, en le recevant, n’avait pas entendu introduire dans son sein le sacerdoce, prône et foudres y compris. Si chez M. Dupanloup le prêtre était inséparable de l’homme, il n’avait qu’à refuser l’hommage de l’Académie, et faire comme le Père Lacordaire, s’abstenir de prendre part aux séances, aux travaux et aux votes. D’autre part, M. Alloury écrivit dans les Débats, après l’échec de Littré : « C’est un malheur dont il trouvera aisément la consolation dans ses travaux. Ses amis l’ont vu calme et tranquille et n’ont pu qu’avec peine détourner un moment son attention de ses livres. » — « Nous regrettons, ajoutait le journaliste, que l’Académie, qui s’était fait honneur de compter parmi ses membres les Montesquieu, les Voltaire et les libres-penseurs du dernier siècle, ait hier constitué définitivement dans son sein une nouvelle congrégation de l’Index... Les gens de lettres crieront. La belle affaire ! Est-ce que l’Académie est faite pour les gens de lettres ? Il faut bien qu’ils sachent qu’avec les titres les