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Nombreux, hélas ! sont les villages dont les cimetières sont, tout blancs de petites croix incessamment multipliées par les maux innombrables qui, dans ce temps de détresse et de disette, atteignent les tout petits et vident les berceaux.

Sur le siège de l’auto, M. Green, tout en maniant avec dextérité son volant de direction, me définit les principes de l’organisation bienfaisante dont nous devons étudier sur place un des plus intéressans effets.

C’est d’abord en Lorraine que nos amis de la Red Cross, en coopération avec le « Fonds américain pour les blessés français » (American Fund for French Wounded) et la commission Rockefeller, songèrent à établir des refuges hospitaliers pour les enfans malades. Les villages des environs de Toul étant bombardés par des obus à gaz asphyxians, le préfet de Meurthe-et-Moselle, M. Mirman, justement inquiet du sort des enfans de ces villages lorrains, apprit que les tout petits, incapables de porter convenablement leurs masques, étaient menacés des plus graves dangers. Dès qu’on sut, à la Croix-Rouge américaine, qu’on avait besoin, en Lorraine, d’une assistance immédiate pour 350 enfans, le docteur J.-P. Sodgwick, la doctoresse Alice Barlow Brown, de Chicago, Mme Horter, infirmière-major, trois nurses, un bactériologiste et un gestionnaire disposant de deux automobiles, furent envoyés à Toul, avec mission de prendre d’urgence toutes les mesures nécessaires. C’était le 27 juillet 1917. Les enfans, tous âgés de moins de huit ans, furent installés dans des baraques neuves, où ils furent rejoints, quelques jours après, par les petits évacués des communes de Pompey et de Frouard. Dès le 5 septembre, cette formation sanitaire fut inaugurée par les autorités civiles et militaires de la région. Entre temps, le représentant de la Croix-Rouge française à Nesle avait fait parvenir au délégué de la Croix-Rouge américaine un avis ainsi conçu : « Dans mon secteur, nous avons environ douze cents enfants, dont sept cent cinquante viennent de Nesle. Beaucoup de ces enfans âgés de douze à quinze ans sont menacés de tuberculose... Je vous demanderai donc d’envoyer à Nesle un de vos médecins, pour visiter nos cinq communes... » Aussitôt dit, aussitôt fait.

Le docteur Baldwin, venu de l’université John Hopkins de Baltimore pour soigner les enfans du secteur de Nesle, est un grand jeune homme blond, à l’air pensif et doux. Correctement