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plus souvent vrai. Il ne faut pas fatiguer un mécanisme inutilement : mais, dans les limites du travail utile, on a avantage à en tirer un effort aussi continu que possible : ce qui revient encore une fois à travailler par grandes masses et en séries. On use ainsi plus vite son engin ; mais on immobilise moins longtemps le capital qu’il représente et la place qu’il occupe dans l’usine ; puis, quand la machine est lasse, on emploie le bénéfice qu’on en a tiré à acheter bien vite un appareil nouveau, ayant pu recevoir un perfectionnement dans l’intervalle.

Dans le même ordre d’idées, c’est une mauvaise économie que de garder un engin usé, un outil médiocre, pour l’emploi desquels l’ouvrier doit déployer son ingéniosité en perdant un temps précieux. L’industrie moderne vit de perpétuels sacrifices et doit procéder par amortissements extrêmement prompts.


MAIN-D’ŒUVRE FÉMININE

L’emploi de la main-d’œuvre féminine ne nous arrêtera qu’un instant. On sait combien il s’est généralisé et quels services il a rendus pendant la guerre. Il offre des inconvénients connus d’hygiène sociale et morale ; poussé à l’exagération, il contribuerait à la dépopulation et rendrait la crise encore plus grave dans l’avenir. Néanmoins, à titre provisoire et limité, on sera certainement amené à le conserver après la guerre dans des proportions ignorées auparavant.

On peut craindre, il est vrai, qu’il ne se présente quelques difficultés au début quand le démobilisé, voulant reprendre son emploi et considérant volontiers qu’il y a là pour lui un droit absolu, trouvera sa place prise par une femme. Mais cette petite crise, si elle se produit, sera sans doute limitée à la courte période de confusion première, où l’on doit prévoir un peu de chômage. Le manque de main-d’œuvre facilitera ensuite la solution de ce problème, comme de tous les autres semblables.

D’ailleurs, beaucoup de ces femmes ajouteront leur salaire à celui d’un mari, qui ne s’en plaindra pas. D’autres, au contraire, se trouveront, amenées à rentrer dans leur ménage reconstitué pour y soigner leurs enfants. Si les salaires devaient baisser, cela pourrait être inquiétant par suite des habitudes trop larges qu’a contribué à développer le régime de guerre ; mais on peut prévoir pendant longtemps encore de