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France put rentrer en possession de l’Alsace : trois fois en fait, une fois par traité. Chaque fois, les Germains réussirent à recouvrer leur conquête ; et ce leur fut trois fois l’occasion d’envahir la France : ils pénétrèrent en Champagne, poussèrent jusqu’à Orléans. « Étrange spectacle, qui montre avec quelle ténacité la France ne se résolvait pas à abandonner une terre qu’elle considérait comme lui ayant été injustement ravie !... » Mais l’Alsace, que veut-elle ? En 869, à la mort de Lothaire, Charles le Chauve entre en Lorraine, est couronné roi du pays lorrain : « les grands d’Alsace, témoignant de leur sentiment antipathique à l’égard de leur annexion à la Germanie, se prononcent pour lui. » Ensuite, les rois de France perdent la Lotharingie et l’Alsace. Charles le Simple reprend la Lotharingie et l’Alsace. Il traite avec Henri l’Oiseleur. « Les deux princes se rencontrèrent dans un bateau sur le Rhin, accompagnés chacun de comtes et d’évêques, se promirent de maintenir la paix entre eux sur la base des territoires qu’ils occupaient. Or, les grands de Lotharingie accompagnaient Charles : à ce moment, novembre 921, l’Alsace était à la France. » Mais, en dépit du traité, Henri l’Oiseleur envahit l’Alsace et la prend. Alors ? « Les grands de Lotharingie, ne voulant pas accepter sa domination, font appel à la France, où un ancêtre d’Hugues Capet, Raoul, a remplacé Charles le Simple sur le trône. Et la chronique de Flodoard raconte comment Raoul, l’année 923, reçut leur soumission, prit Saverne ; comment Henri l’Oiseleur, venant à sa rencontre et choqué de ce que les gens d’Alsace se fussent prononcés pour son adversaire, ravagea le pays entre le Rhin et la Moselle, emmenant même la jeunesse en esclavage ; comment Raoul lui fit repasser le Rhin et demeura deux ans maître du pays. » Voilà ce qu’on peut lire dans la chronique de Flodoard, où maintes choses ne semblent pas vieilles de neuf siècles, n’est-ce pas ?... Seulement, des invasions des Normands obligèrent Raoul à négliger sa conquête ou sa reprise de l’Alsace ; Henri l’Oiseleur en profita et, de nouveau, s’établit sur la rive gauche du Rhin. A la mort de Henri l’Oiseleur, son fils Othon Ier monta sur le trône. « Les grands de Lotharingie et d’Alsace, qui continuent à ne pas vouloir de l’hégémonie germanique, offrent au roi de France Louis d’Outremer, un Carolingien, de venir reprendre leur pays. Louis d’Outremer accepte. Évêques et comtes de Lotharingie lui prêtent hommage, parmi eux les seigneurs d’Alsace, Éberard comte d’Alsace et Ruthard évêque de Strasbourg, qui vont être l’âme de la résistance contre la Germanie... » Othon Ier survient, avec son armée : il pille, brûle et massacre ; c’est toujours la même histoire.