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On dit que nous mentons. Oui, nous mentons. Nous mentirons encore, et, quand les temps seront meilleurs, nous ne mentirons plus ![1].


Où et quand n’ont-ils pas menti ?

Ils ont menti à leurs populations, à leurs propres soldats. Ils ont égaré l’opinion dans les pays neutres. Ils ont trompé le Pape. Ils auraient trompé Dieu, s’ils l’avaient pu, en accouplant leur Gott mit uns ! à leurs iniquités.

À Louvain, à Malines, ailleurs encore, vingt fois, quand l’envie leur a pris de saccager une ville, ils ont dit que des civils avaient tiré sur eux ! À Reims, ils ont prétendu qu’on avait fait de la Cathédrale une forteresse : des troupes dedans, des canons dessus, des mitrailleuses, postes militaires, parc à munitions, signaux lumineux, que sais-je encore ?


I

Ce mensonge de Reims serait particulièrement cynique et vil, si la destruction de la Cathédrale avait été résolue d’avance.

Y a-t-il eu préméditation ?

Si les preuves péremptoires nous manquent pour l’établir, nous avons du moins, pour le penser, des présomptions.

À quel moment, dans quelles circonstances l’ont-ils condamnée ? Quel mobile les y a poussés ? Ceux-là seuls qui ont décidé ce forfait pourraient nous l’apprendre. Ils ne s’en sont point vantés encore. Le prétexte, ils l’ont dit ; mais la raison ?

À qui fera-t-on croire pourtant, qu’un obscur commandant de batterie, ou même un officier supérieur, ait pu prendre l’initiative d’un acte pareil, sans être publiquement brisé et désavoué le lendemain, si son geste avait contredit la pensée du Maître ? Plutôt que d’endosser devant le monde, devant l’Histoire, cette responsabilité, le gouvernement allemand n’aurait pas hésité à sacrifier un homme.

Or, ni la diplomatie, ni la presse, qui ont fait tapage avec le mensonge, n’ont jamais parlé de blâme et de désaveu.

L’idée a-t-elle germé tout à coup dans le cerveau allemand ?

On a cité un texte de J. Görres, en 1814, qui réclamait la

  1. Cité par le Strassburqer Post.