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n’en pouvait douter et elle pouvait lui sembler équitable. L’Empereur avait cédé au grand-duc, de Berg ses droits sur la couronne des Deux-Siciles, mais la condition expresse de cette cession avait été « une ligue offensive et défensive sur terre, comme sur mer, entre l’empereur des Français et le roi des Deux-Siciles, » et, quoi que pût dire Murat, la rupture de l’alliance ne pouvait guère se discuter. Quant à garantir au Roi les biens « qui lui avaient été cédés pour en jouir à titre de propriété particulière, » il n’en avait point été question dans le traité, et ce fut une habileté de Coussy et de Fouché d’alléguer le contraire. Peut-être pensaient-ils que la garantie était implicite. En tout cas, ce fut sur un tel considérant que la Commission de gouvernement (duc d’Otrante, président, Carnot, Grenier, Quinette, Caulaincourt membres) se fonda pour prendre un arrêté, « restituant au prince Joachim ses biens de France, estimés à dix millions pour tenir lieu des biens situés dans le royaume de Naples pour lesquels il était impossible de fournir la garantie stipulée. » Quant aux biens qui auraient été aliénés, le prince Joachim en recevrait la valeur. Cet arrêté était en date du 5 juillet : expédition en fut transmise à Coussy par Montalivet, intendant général de la Couronne, le 7, le jour même où Fouché fit fermer la Chambre des représentants, la veille de l’entrée à Paris de Louis XVIII, la veille de la seconde Restauration.

C’était l’acte testamentaire du Gouvernement provisoire, mais serait-il exécuté ? Sans perdre une heure, Coussy envoie par Gruchet cette pièce à Murat. Il joint une lettre « où il parle de l’espoir qu’il a que l’empereur de Russie ne refusera pas de parler pour le maintien de la restitution de ces biens, fondé sur l’équité. « Il demande au Roi sa procuration pour suivre ses affaires d’intérêt et agir conformément à ses intentions, et il ajoute : « On dit qu’il va être assemblé un congrès où Louis XVIII lui-même serait mis en question. Ce serait le moment de parler pour Votre Majesté. Vous trouverez des amis fidèles, et quelques-uns de vos ennemis même, n’ayant plus rien à craindre, seront plus humains. » Il termine en disant : « qu’ayant appris, avant le départ de Napoléon pour se rendre au lieu de son embarquement, qu’il avait des sommes d’argent considérables, son intention était de lui envoyer