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Ils sont dans une voiture de Murat que l’on croit remplie d’argent. Ils demandent d’eux-mêmes à être fouillés. On ne leur trouve que peu d’argent, quelques diamants, et des reconnaissances de bijoux. On va les relâcher, lorsque l’examen des papiers saisis sur Gruchet fait soupçonner une relation entre leur voyage et les projets de Murat. La duchesse est mise en liberté, mais on expédie Bonafous sur Marseille, où il est gardé à vue jusqu’au 6 septembre.

Ainsi Murat est coupé de Paris, coupé de tous ceux qui s’intéressent à lui, surtout de Fouché, qui ignore entièrement ce qu’a machiné Decazes. Brune, de plus en plus indécis, va céder aux injonctions du marquis de Rivière, arborer le drapeau blanc, proclamer Louis XVIII, et quitter la place sur l’assurance « qu’il n’aura rien à craindre, s’il consent à abandonner le commandement de l’Armée du Var, et à sortir de Toulon, » Il se dispose donc à rentrer à Paris : on sait comment, malgré les assurances de M. le marquis de Rivière, il fut massacré le 2 août à Avignon. De combien s’en fallut-il que les bandes marseillaises, enivrées de leurs tueries, enhardies par l’impunité, rivalisassent avec les bandes comtadines et donnassent le meurtre du maréchal Murat pour pendant au meurtre du maréchal Brune ? Elles approchaient de Toulon et se disposaient à y renouveler les atrocités des derniers jours de juin. Le Roi ne pouvait plus sans témérité rester à Plaisance ; il dut d’abord rentrer en ville, puis chercher un asile ignoré dans une bastide à une lieue et demie de Toulon, sur la route d’Antibes.

Pour détourner les chiens, Joliclerc a annoncé le 29 juillet au ministre de la Police et a fait répandre que Murat a quitté le pays le 20. « Il avait fait préparer un bâtiment de commerce pour s’embarquer, écrit Joliclerc. Il paraît cependant qu’il a pris le chemin des montagnes avec deux personnes seulement. On veut même qu’il ne soit pas très loin de Toulon, attendant une réponse de Lord Wellington, à qui il avait fait demander un passeport pour se retirer en Angleterre. Sa maison se disperse entièrement. Chacun de ses officiers retourne dans son pays natal. Le duc délia Rocca-Romana m’a fait demander des passeports pour Lyon où il en sollicitera de nouveaux de Votre Excellence pour gagner Paris. »

Il y a, dans les trois séries de faits allégués par Joliclerc,