Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 49.djvu/301

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il présentait à la vérité une seconde proposition : « Si pourtant, disait-il, cet étranger croit devoir faire valoir sa justification auprès de S. M. Louis XVIII, qu’il se rende à Bastia, où il pourra attendre le résultat et tranquillisera par là notre ville et nos campagnes. Il sera logé dans la citadelle autant commodément que les localités le permettront. » Cette invitation n’avait rien de particulièrement tentant, d’autant que le colonel annonçait en terminant l’envoi d’un officier de gendarmerie chargé de vérifier les « passeports du voyageur et de lui servir de sauvegarde jusqu’au point de son embarquement. »

Cet officier de gendarmerie, le lieutenant Serra, se présenta le 26 à la pointe du jour, accompagné de trente gendarmes. Mais cette escorte était dès lors insuffisante pour une arrestation de vive force. Les habitants du Vescovato, et ceux des villages voisins, n’eussent point laissé enlever l’hôte de Franceschetti. « Le lieutenant Serra sollicita et obtint l’honneur d’être présenté au Roi. » « Le Roi le reçut avec affabilité et l’assura que loin d’être dans l’intention de porter le trouble et la discorde dans l’ile, il se ferait un devoir de respecter toujours le gouvernement de S. M. Louis XVIII. »

Le même jour, à six heures du soir, M. Filippi, autre gendre de M. Ceccaldi, apporta au colonel Verrier « les assurances des intentions du roi Murat, qui étaient, écrit Galloni au marquis de Rivière, non seulement de ne troubler la tranquillité publique ni le repos d’aucune famille particulière de la Corse, que plutôt il se brûlerait la cervelle, mais que, s’étant soustrait aux persécutions des partisans de Toulon, il était venu en Corse pour attendre la réponse du ministre de la police à qui il s’était adressé pour avoir le passeport pour l’Allemagne ou pour les Etats-Unis, qu’il attendait également la réponse de sa femme à laquelle il avait écrit pour solliciter la permission auprès de la cour de Vienne pour rester dans ses Etats. » Le colonel ordonna à M. Filippi « de dire à M. Ceccaldi et au roi Murat qu’il n’aurait fait aucun mouvement contre eux, pourvu qu’il n’eût aucun rapport qui ne lui donne lieu à se plaindre de leur conduite, qu’il allait en rendre compte au ministre et attendre ses ordres, et qu’en attendant il pouvait rester tranquille au Vescovato, et qu’il allait donner ordre à l’officier de gendarmerie de se retirer avec son détachement. »