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une attaque de plus de deux régiments, ont pu prolonger leur résistance aux ailes, mais le centre est enfoncé. L’assaillant a perdu beaucoup de monde, certes, mais il foisonne dans le parc dont les taillis le protègent contre les mitrailleuses.

Quelle résistance y rencontre-t-il ? Le colonel Tissier qui a son poste de commandement dans les bois est dès lors en péril. Il s’est déjà démuni d’une compagnie de réserve, la 1re, qu’il a jetée au combat dès qu’il s’est aperçu d’un fléchissement au centre et qui a fondu comme une cire. Deux sections du génie (de la compagnie 14/63), énergiquement conduites par le lieutenant Lardy et l’adjudant Rousie, déposent en hâte leurs pelles et leurs pioches, et s’élancent fusil en main. Elles s’infiltrent dans les taillis, s’y battent corps à corps, disparaissent. Le colonel Tissier a fait appel à la 2e compagnie en réserve près de Gury : elle arrivera trop tard. Il prescrit une contre-attaque avec la 5e compagnie qui partirait du mur Sud-Est du parc et prendrait l’ennemi en travers. Le commandant Delmas lui rend compte que la contre-attaque se prépare. Le téléphone fonctionne encore, le commandant appelle : l’appareil, brusquement, se tait. Plus rien : le colonel a été tué à son poste. Il est près de dix heures du matin.

Cependant la contre-attaque de la 5e compagnie est partie : elle longe le mur Sud-Est du parc, puis se redresse face au château, mais dès qu’elle apparaît en terrain découvert, la compagnie est prise sous le feu des mitrailleuses ennemies, déjà installées au château et dans le village. Le capitaine Cocusse qui la commandait et qui encourageait ses hommes du geste et de la voix sous une grêle de balles, tombe mortellement frappé. Les deux autres officiers sont l’un tué, l’autre blessé : la petite troupe se disloque. À la même heure, la résistance de la Porte Rouge a cessé : le commandant Delmas n’a plus de bataillon.

« L’ennemi est maître du parc, dit l’émouvant rapport de la 77e division. Mais il est désorganisé, épuisé ; il a perdu ses chefs de bataillon, un de ses colonels ; il a éprouvé des pertes considérables ; les 66e et 12e régiments sont mélangés ; le 36e régiment a été engagé à son tour Le 97e leur a bien fait payer leur avance. Pèle-mêle, évitant le terrain libre où ils ont laissé tant de monde et que flanquent les mitrailleuses, les unités allemandes s’amassent dans le couvert du bois. Des groupes