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reconstruction, conséquence de la guerre et des principes des Alliés victorieux, ne peut manquer, avec le temps, d’aboutir, en Europe, à la constitution d’une série de fédérations com- posées d’Etats de toutes dimensions et de toutes formes constitutionnelles, unis entre eux par des liens plus ou moins étroits, depuis la simple alliance militaire et économique, jusqu’à une union intime, mitigée seulement par l’autonomie administrative.

La Russie de l’avenir nous apparaît sous la forme d’une vaste fédération de cette nature ; les diverses parties de la nation russe, y compris l’Ukraine, y trouveront leur place ; les petites nations qui entourent la masse russe s’y agrégeront tout en gardant leur indépendance. Mais, pour le moment, la situation se présente sous un aspect tout autre ; c’est la Russie qui a surtout besoin d’aide et de secours ; elle est en pleine décomposition, tandis que les nations qui l’entourent entrent dans la phase de reconstruction. C’est ce que les « commissaires du peuple » ont compris et ce qui explique les efforts désespérés qu’ils tentent aujourd’hui pour « bolcheviser » et détruire les Etats en voie de constitution. Nous verrons donc d’abord comment peuvent s’organiser les nations qui se séparent de la Russie et selon quelles affinités elles paraissent devoir se grouper ; nous tenterons ensuite d’indiquer quelles méthodes et, pour ainsi dire, quels traitements curatifs, les Alliés pourraient appliquer pour le salut de la Russie.


II

La France, au cours de sa glorieuse histoire, n’a cessé de combattre pour son existence et les libertés de l’Europe contre la masse des peuples germains. Depuis François Ier, les appétits de conquête de cette race envahissante trouvèrent d’abord leur expression dans les rêves de monarchie universelle de la « Maison d’Autriche, » puis dans la formidable machine de guerre dressée par la noblesse prussienne et ses rois Hohenzollern. Dans cette lutte séculaire, dont nous venons de vivre le plus tragique épisode, l’instinct de la conservation a fait rechercher, par les gouvernements qui se sont succédé en France, l’alliance de la Puissance, — quelle qu’elle fût, — qui, située, par rapport à notre pays, de l’autre côté de l’Allemagne, pouvait, en