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assez peu relevé : les imitations : « Le premier de ce mois (août 1727), le sieur Lœillet, musicien de l’électeur de Bavière, qui possède divers instruments et qui sait les allier avec un talent admirable, divertit beaucoup la Reine et toute sa cour. Il commença par le basson, le violon, la flûte allemande, la flûte douce, la flûte à voix (?), en faisant deux parties, et le hautbois. Il passa ensuite derrière un paravent et chanta un motet à quatre parties, accompagné d’un violon et de deux flûtes. Le sieur Lœillet fit entendre encore les deux flûtes et une voix qui chantait la basse, à quoi un grand chœur de musique succéda. Il parut interrompu par une querelle et batterie, où l’on croyait entendre des cris de femmes et d’enfants, le bruit que font des hommes l’épée à la main, et le tumulte que pourraient faire quarante personnes, qu’on entendait crier au secours, au guet, et l’arrivée du guet, à pied et à cheval. La Reine, ne pouvant s’imaginer qu’un homme seul pût faire tant de différentes parties, fit entrer le sieur Lœillet dans sa chambre en présence de tout le monde et Sa Majesté loua beaucoup un talent si extraordinaire [1]. »

La Reine pourtant ne laissait pas de prendre plaisir à de plus sérieux concerts. Le duc de Luynes encore parle d’une fête nautique offerte à Sa Majesté par la Duchesse d’Orléans (avril 1736). « Il y eut une musique dans les bateaux, nombreuse cl bonne ; mais, le vent étant contraire, on ne l’entendit point du tout du pavillon. » Cette fois, le grand Roi n’était plus, les vents n’avaient point obéi. Les gazettes de l’époque relatent fréquemment des séances musicales données chez la Reine. Destouches en ordonna plus d’une, sur le modèle des concerts spirituels récemment fondés à Paris. Mais les « imitations » reprenaient bientôt l’avantage et l’on rapporte qu’en 1746 encore, la Reine, étant un jour à diner, se divertit grandement aux exercices que fit, en ce genre, « la demoiselle Marianne, Allemande. »

Le Dauphin parait avoir été meilleur musicien, et plus sérieux, que sa mère. En quoi ses sœurs, Mesdames, lui ressemblaient. Dans la pièce qui lui-servait de cabinet, au rez-de-chaussée du château, à l’angle de la façade principale, du côté de l’Orangerie, le prince avait fait placer un orgue. C’est à

  1. Le Mercure de France, cité par Michel Evenet. (Les concerts en France sous l’ancien régime.)