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faire savoir si elle a connaissance de l’arrestation d’un individu nommé Macirone. » Sur l’heure, Fouché demanda un rapport a Decazes, ordonna la mise en liberté de Macirone, et en informa Sir Charles Stuart. Dans le rapport sommaire que le préfet de police remit le même jour, il avoua, sans détails, l’arrestation de Coussy et celle de Gruchet. Le 8, sur de nouvelles injonctions du ministre, il entra dans quelques explications, résuma les interrogatoires et les pièces saisies. Elles prouvaient simplement l’intention où était Murat de demander asile en Angleterre, mais, par certains documents, tels que l’arrêté de la Commission provisoire, les lettres de Coussy, et même celles de Murat, Fouché pouvait être compromis, et Decazes ne manqua point d’y insister. Il conclut à ce que les « sieurs Macirone et de Coussy, » contre lesquels de suffisantes preuves en matière de délit n’avaient pu être obtenues pour les traduire en cour de justice réglée, fussent détenus jusqu’au moment où Murat aurait quitte le royaume. En marge de ce rapport, le duc d’Otrante écrivit de sa main : « Le roi de Naples est embarqué depuis vingt jours, » et il ordonna la mise en liberté de Macirone, de Coussy et Gruchet. Decazes « obtint que les deux derniers seraient placés sous surveillance hors Paris [1]. »

Dans la lutte qu’il soutient contre Decazes et contre Vitrolles, Fouché est trahi par la plupart de ses anciens agents qui ont passé à ses adversaires ; il est désobéi par ses subordonnés, ouvertement combattu par ses collègues et par le Roi qu’il vient de rétablir sur le trône. Il s’est donné pour but d’accomplir cette révolution qu’il estime inévitable, sans effusion de sang, sans proscription générale, sans mesures de réaction violentes. Il s’est employé jusqu’à s’y compromettre, à assurer le départ de Napoléon, de Joseph, de Jérôme et de tous ceux qu’il a placés lui-même sur la liste imposée par les ministres étrangers, et il a été en toute occasion traversé par les ministres du Roi, et surtout par son préfet de police. Il a engagé avec

  1. Parmi les rapports sur l’affaire Macirone, il s’en trouve un que Decazes, devenu ministre secrétaire d’État au département de la Police générale, se fit adresser par un nommé Ménard, et qui relate tout l’historique de l’affaire. C’est là qu’on trouve ces détails : « Le portefeuille de ce ministère n’était pas encore dans vos mains. Monseigneur, écrit ce Ménard, et vous fûtes alors, en qualité de conseiller d’État, préfet de police de cette grande cité, appelé par votre prédécesseur, à faire un rapport sur cette première affaire dont les détails se reportent à la fois à votre souvenir. Ce rapport n la fois ferme et lumineux, et plein d’un véritable zèle pour l’intérêt et la sureté de l’État... »