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donnait à mains pleines. Et beaucoup répondaient aux remerciements : « N’est-ce pas à nous que nous donnons ? »

Un comité formé peu d’années avant la guerre pour la « défense des intérêts français en Orient, » et qui réunissait les noms de MM. Ribot, Léon Bourgeois, Paul Deschanel, Lavisse, Denys Cochin, chargea un écrivain distingué, M. Maurice Pernot, « de présenter sur la situation des établissements laïques ou religieux protégés par la France dans le Levant, un rapport impartial et complet. » Après un voyage d’étude qui dura sept mois, en 1912, M. Pernot rédigea un remarquable rapport où je trouve, avec la confirmation de mes souvenirs syriens, un riche ensemble de renseignements détaillés sur l’état des œuvres françaises d’assistance et d’enseignement à Constantinople, en Asie Mineure, en Mésopotamie, en Egypte et en Syrie. Précieux par l’abondance des informations qu’il contient sur des écoles que plus de cent mille élèves fréquentaient à la veille de la guerre, sur des hôpitaux, dispensaires et asiles qui assistèrent, en cette même année 1912, plusieurs centaines de milliers de malades ou d’infirmes, ce document n’est pas moins intéressant par le sentiment général qui s’y exprime.

Une fois de plus, un Français de haute culture, qui n’avait pas encore eu l’occasion de se faire une idée nette de notre œuvre morale et notre situation morale en Orient, a été, sur les lieux mêmes, frappé d’admiration devant la réalité de cette situation et de cette œuvre. Ce n’est pas dans une région particulière, c’est dans tout l’Islam du Levant, dans les campagnes comme dans les villes, de Constantinople au Caire, à Jérusalem, à Caïffa, au Liban, à Damas, à Bagdad, à Mossoul, à Smyrne, qu’il a trouvé, sous l’œil du consul de France, la maison française d’assistance et la maison française d’enseignement en activité l’une auprès de l’autre, récompensées toutes deux de leur généreux labeur par les sentiments dont la France est l’objet grâce à elles.

Il importe de comprendre ce succès, ne serait-ce que pour savoir en maintenir les conditions. Aux yeux de ceux qui ont vécu en Orient, nul doute que le dispensaire n’ait ouvert les voies à l’école et ne l’ait en quelque sorte accréditée. Dans un monde singulièrement dur, la charité s’est trouvée être la première des forces, — le rayon de soleil de la fable qui oblige doucement le voyageur à se décharger de l’épais manteau que